Le président putschiste du Honduras, Roberto Micheletti, a cédé à la pression américaine et accepté la perspective d'un retour au pouvoir limité dans le temps du chef de l'État déchu Manuel Zelaya, pour clore la crise politique qui paralyse le pays depuis quatre mois.

Le texte de l'accord annoncé jeudi soir a été remis vendredi au Congrès, qui doit encore donner son aval à une date indéterminée.

«L'accord est signé», a annoncé un représentant de M. Zelaya, Rodil Rivera.

Cet accord est déjà entré en vigueur dès sa signature, mais c'est lundi seulement qu'il sera officiellement présenté, selon le texte, dont l'AFP a eu connaissance.

Il prévoit la mise en place d'un gouvernement d'union nationale pour le 5 novembre, sauf dans le cas, improbable, d'un avis contraire du Congrès. Et il confirme la date de l'élection présidentielle, le 29 novembre.

L'accord restreint grandement les prérogatives de M. Zelaya, renversé le 28 juin par un coup d'État, et qui reviendrait donc à la tête de l'État jusqu'à la fin de son mandat, le 27 janvier: il devra renoncer à réformer la Constitution pour briguer un deuxième mandat, comme il avait entrepris de le faire.

Son projet de réforme, jugé illégal par la justice et la majorité des parlementaires, avait été à l'origine du coup d'État du 28 juin dernier, qui a propulsé au pouvoir M. Micheletti.

Depuis, l'ancien président du Congrès résistait obstinément aux pressions de la communauté internationale, qui réclamait, sanctions économiques et diplomatiques à l'appui, le rétablissement de M. Zelaya dans ses fonctions.

Il a fini par céder après une relance des pourparlers sous la pression du délégué américain pour l'Amérique latine, Thomas Shannon, envoyé à Tegucigalpa par la secrétaire d'État Hillary Clinton.

Il l'a annoncé jeudi soir: «j'ai autorisé mon équipe de négociateurs à signer un accord marquant le début de la conclusion à la situation politique du pays».

«Je crois que les Honduriens ont compris qu'il s'agissait du premier pas vers la normalisation de nos relations», a déclaré M. Shannon.

Les États-Unis ont gelé plusieurs aides au Honduras, 3e pays le plus pauvre d'Amérique latine, et ont suspendu les visas de plusieurs dirigeants putschistes.

M. Micheletti a d'ailleurs demandé à la communauté internationale de lever les sanctions prises contre le Honduras depuis le coup d'État.

M. Zelaya, grand propriétaire terrien auteur d'un virage à gauche qui avait hérissé ses anciens alliés conservateurs l'an dernier, a fait part de sa «satisfaction» et salué un processus permettant «le retour de la démocratie».

«C'est un premier pas vers mon retour au pouvoir, qui prendra encore un moment. Je suis d'un optimisme mesuré,» a déclaré à l'AFP M. Zelaya depuis l'ambassade du Brésil, où il est réfugié depuis son retour clandestin au pays le 21 septembre.

Mme Clinton, en visite au Pakistan, a salué un «accord historique».

«Je ne vois aucun autre exemple de pays en Amérique latine qui après une interruption de son fonctionnement démocratique a réussi à surmonter une telle crise par la négociation et le dialogue», a-t-elle dit.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-Moon, juge cet accord «encourageant» et espère que «le Honduras est sur le chemin du rétablissement de la démocratie et de l'ordre constitutionnel», a indiqué l'ONU dans un communiqué.

L'Union européenne et l'Organisation des États américains (OEA) ont également félicité les deux parties et promis d'accompagner ce processus jusqu'aux élections.

L'accord prévoit également la création de deux commissions: l'une de vérification pour veiller au respect des points de l'accord, et l'autre de vérité pour enquêter sur les événements qui se sont produits avant, pendant et après le coup d'État.

Les dates-clés de la crise:

28 juin: M. Zelaya est arrêté au saut du lit et expulsé au Costa Rica, alors qu'il s'apprêtait à organiser une consultation populaire, jugée illégale par la Cour suprême, visant à réformer la Constitution pour autoriser la réélection du chef de l'État. Le président du Congrès Roberto Micheletti est propulsé à la tête d'un gouvernement de facto, non reconnu par la communauté internationale qui dénonce un coup d'État.

5 juillet: Le président déchu tente de revenir en avion, mais l'armée bloque la piste de l'aéroport de Tegucigalpa. À l'extérieur, un manifestant pro-Zelaya est tué et plusieurs autres blessés lors d'affrontements avec les forces de l'ordre.

9 juillet: Première tentative de médiation du président du Costa Rica, Oscar Arias. Elle échoue devant le refus du camp Micheletti d'un retour au pouvoir de Zelaya.

24 juillet: Zelaya pose brièvement le pied au Honduras, pour la première fois depuis le coup d'État, puis revient au Nicaragua, où il a trouvé asile depuis le 28 juin.

21 septembre: Retour clandestin au Honduras de Zelaya, qui se réfugie à l'ambassade du Brésil à Tegucigalpa.

7 octobre: Ouverture d'un nouveau dialogue entre représentants des deux camps sous l'égide de l'OEA.

29 octobre: Micheletti accepte la perspective du retour au pouvoir de Zelaya, afin de mettre fin à la crise.