Le Venezuela pourrait porter un coup dur à l'économie colombienne en supprimant ses importations en provenance de son voisin, comme l'envisage son président Hugo Chavez. Mais il devra rapidement trouver d'autres fournisseurs pour éviter des pénuries.

«Nous allons remplacer toutes ces importations», a déclaré mercredi M. Chavez, qui avait déjà annoncé le gel de ses relations avec Bogota une semaine plus tôt pour protester contre un projet d'accord militaire américano-colombien prévoyant la mise à disposition de sept bases aux troupes des États-Unis.

Dans la foulée, le dirigeant vénézuélien a annulé un accord passé en avril avec son homologue colombien Alvaro Uribe, prévoyant l'importation de 10000 voitures.

Le gel du commerce bilatéral constitue une menace de taille pour Bogota, qui a exporté pour 6 milliards de dollars l'an dernier chez son voisin. Le Venezuela représente ainsi son deuxième partenaire commercial derrière les États-Unis.

«Toute la viande colombienne d'exportation est destinée au Venezuela. Pratiquement 80% des exportations de cuir, d'automobiles, de pièces détachées, de produits manufacturés et de textiles partent au Venezuela», détaille Gustavo Marquez, ambassadeur du Venezuela à Bogota jusqu'à son rappel par M. Chavez la semaine dernière.

«À l'inverse, c'est beaucoup plus facile pour le Venezuela, qui est avant tout un pays importateur, de s'adapter à cette réalité,» a-t-il ajouté au micro de la radio RNV.

Le ministre colombien du Commerce, Luis Guillermo Plata, assure cependant que son pays ne sera pas le seul pénalisé.

«Ce n'est pas facile pour la Colombie de chercher d'autres marchés, mais ce ne sera pas facile non plus pour le Venezuela de trouver de nouveaux fournisseurs du jour au lendemain», a-t-il déclaré récemment.

D'autant que le premier exportateur latino-américain de pétrole importe la plupart de ses denrées de base et souffre de pénuries récurrentes, de riz, de sucre, lait ou café.

Pour éviter une rupture d'approvisionnement, M. Chavez a indiqué mercredi qu'il envisageait de se tourner vers des pays «amis» comme le Brésil, qui produit «plus que la Colombie et parfois moins cher», et l'Argentine, pour s'approvisionner en viande, lait ou voitures.

Jeudi, les ministres vénézuéliens de l'Agriculture, de l'Alimentation et du commerce ont d'ailleurs voyagé à Buenos Aires pour négocier une hausse des achats en provenance de ce pays, qui est l'un des premiers exportateurs de céréales au monde. La présidente argentine Cristina Kirchner doit quant à elle se rendre mardi à Caracas avec une délégation d'entrepreneurs.

«C'est un pays plus sûr, un véritable allié. Il ne lance pas d'accusations malveillantes contre nous pour justifier une politique à la solde de l'empire yankee (américain)», a souligné le président vénézuélien.

Une allusion aux accusations de Bogota sur de présumées livraisons de lance-roquettes de l'armée vénézuélienne à la guérilla marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), destinées selon M. Chavez à détourner l'attention du projet d'accord militaire américano-colombien.