L'Équateur et la Colombie, au centre en 2008 d'une tempête diplomatique régionale, vivent une nouvelle crise autour de l'ex-ministre de la Défense colombien et possible futur candidat à la présidence Juan-Manuel Santos, réclamé par la justice équatorienne.

Les relations «sont rompues. Les dialogues politique et diplomatique sont gelés», a déclaré mercredi le ministre équatorien des Affaires Étrangères, Fander Falconi, devant la presse étrangère.

 

À la question de savoir si elles traversaient leur pire moment, il a répondu «oui, bien sûr».

 

Tout est parti d'un mandat d'arrêt délivré le 29 juin par le juge Daniel Mendez, de Sucumbios (200 km au nord de Quito), en charge de l'enquête sur le bombardement par l'armée colombienne le 1er mars 2008 d'un camp des Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie, marxistes) en territoire équatorien.

 

L'attaque avait tué 25 personnes, dont le numéro deux de la guérilla Raul Reyes, et entraîné la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays par Quito. Le Venezuela, allié de l'Equateur, avait vivement réagi, massant des troupes à sa frontière avec la Colombie.

 

Le 29 juin, le juge Mendez a annoncé qu'il émettait un mandat d'arrêt contre Juan-Manuel Santos, alors ministre de la Défense, en estimant qu'il était à ce titre responsable d'«atteintes à la vie».

 

Si le mandat était validé par Interpol, il pourrait compromettre les mouvements de l'ex-ministre, qui a quitté son poste en mai pour pouvoir éventuellement mener campagne pour la présidence colombienne, en mai 2010.

 

À Bogota, l'annonce a déclenché la colère du président Alvaro Uribe, qui a promis que son gouvernement ferait bloc et traité le juge d'«auxiliaire du terrorisme».

 

Lundi, un groupe d'avocats a déposé une requête devant le parquet colombien en lui demandant de saisir la Cour pénale internationale contre le président équatorien Rafael Correa et d'ex-membres de son gouvernement pour liens présumés avec la guérilla des Farc.

 

Cette accusation relève «d'acrobaties des auxiliaires du para militarisme et du terrorisme d'État», a déclaré le procureur général équatorien Washington Pesantez, en reprenant les insinuations de liens entre l'Etat colombien et les paramilitaires fréquentes chez les opposants d'Alvaro Uribe.

 

D'après Bogota, Interpol aurait refusé de diffuser le mandat équatorien, mais Quito a encore insisté mercredi.

 

«Nous avons adressé une note de protestation à M. Ronald Noble (secrétaire général d'Interpol) en demandant l'émission d'une note rouge (permettant l'interpellation aux fins d'extradition, ndlr)», a déclaré le procureur Pesantez.

 

Pourtant, au début de 2009, Bogota avait multiplié les efforts pour rétablir de bonnes relations avec son voisin. «Espérons que l'on puisse reconstruire les relations avec le gouvernement d'Équateur», avait déclaré le chef de l'Etat lors d'un discours devant le corps diplomatique.

 

En réponse, Quito avait rappelé les conditions posées à la normalisation des relations, passant par une indemnisation pour les dommages causés par le bombardement et une reconnaissance publique de l'absence de liens entre l'Etat équatorien et la guérilla.

 

Depuis, des rapports des services de renseignement colombiens ont à nouveau fait état de la présence de commandants des Farc en territoire équatorien.

 

Le ministre Santos a par ailleurs déclaré à l'occasion de l'anniversaire du bombardement que cette attaque avait été «légitime», déclenchant l'indignation de ses voisins équatorien et vénézuélien.