Grand pourfendeur du coup d'État au Honduras, le président vénézuélien Hugo Chavez joue un rôle clé dans la crise politique qui secoue depuis une semaine le pays d'Amérique centrale, où sa vision d'un front de gauche radical divise profondément la population.

Omniprésent, le nom de celui qui se considère comme le fils spirituel du leader cubain Fidel Castro fait figure tantôt de modèle, tantôt d'épouvantail dans les manifestations organisées à Tegucigalpa depuis le renversement du président Manuel Zelaya.

«Nous ne sommes pas le Venezuela, nous ne voulons pas être Cuba», peut-on lire sur les banderoles brandies par les adversaires du dirigeant déchu.

Dès le début de la crise, le président vénézuélien a incarné la ligne la plus dure, appelant l'Amérique latine à «donner une leçon» au nouveau gouvernement hondurien.

Alors que l'Organisation des États Américains (OEA) se réunit samedi à Washington pour entériner l'exclusion du Honduras, Chavez est le seul dirigeant à avoir ouvertement appelé l'ONU à une intervention militaire.

«Chavez lui-même s'est chargé de créer la polémique», affirme à l'AFP le député démocrate-chrétien Ramon Velasquez, estimant que l'alliance de Zelaya avec Chavez est à l'origine de son éviction.

Selon lui, la crise hondurienne met en jeu «le futur de la démocratie en Amérique latine» et l'équation est simple: «ou nous nous opposons à la menace extérieure qui vient de Chavez ou nous laissons nos nations succomber au populisme».

Au pouvoir depuis 2006, Zelaya, un magnat de l'industrie du bois, élu sous les couleurs conservatrices, a dérouté son propre parti en ralliant brutalement l'an dernier l'Alliance bolivarienne pour les Amériques (Alba), le club anti-libéral fondé par le Venezuela et Cuba.

Comme Chavez et ses alliés bolivien Evo Morales et équatorien Rafael Correa, Zelaya a tenté d'organiser un référendum pour modifier la Constitution et pouvoir se représenter à la tête du pays, lorsque les militaires l'ont contraint à l'exil.

Ses partisans affirment que le président vénézuélien a servi de prétexte aux auteurs du coup d'État.

«C'est sûr que Chavez a un comportement plutôt particulier, mais on peut dire que derrière tout ça, il y a une campagne pour générer la peur et la panique», affirme la députée de gauche, Doris Guttierez.

L'adhésion du Honduras à l'Alba a valu à Zelaya une popularité inédite auprès des couches populaires, qui ne voient pas d'un bon oeil son éventuel retrait.

Le pétrole bon marché et les crédits fournis par le Venezuela lui a permis de financer des programmes sociaux, sur le modèle de Chavez, en faveur des pauvres, la majorité de la population de ce pays de près de 8 millions d'habitants. En représailles au coup d'État, l'aide a été coupée.

«Il y a une politique agressive contre la présence de Chavez et beaucoup de secteurs veulent démanteler les programmes en faveur des plus pauvres sous prétexte qu'ils sont importés du Venezuela», signale Mme Guttierez.

L'intérêt manifesté pour le Honduras par le président vénézuélien, champion auto-proclamé de l'«anti-impérialisme», recèle aussi une valeur symbolique importante, car ce pays a servi de base arrière aux États-Unis contre les guérilla de gauche dans les années 80.

«Chavez va exploiter au maximum ce qui s'est passé au Honduras», estime le politologue colombien Vicente Torrijos, professeur de l'Institut de relations internationales de l'Université Rosario de Bogota.

Selon cet expert, la tournure prise par la crise politique et le soutien unanime apporté à Zelaya par la communauté internationale a donné au dirigeant vénézuélien «l'espoir que le continent finisse par adopter son modèle».