L'escalade se poursuit au Honduras, où les autorités disent ne «rien avoir à négocier» après avoir destitué Manuel Zelaya et ont suspendu plusieurs libertés constitutionnelles, malgré les pressions croissantes de la communauté internationale.

A l'Organisation des Etats américains (OEA) qui a menacé mercredi d'exclure le Honduras si le président Zelaya n'était pas rétabli «dans les 72 heures», le chef de l'Etat par intérim, Roberto Micheletti, a répondu qu'il n'avait «rien à négocier».

Le secrétaire général de l'OEA, Jose Miguel Insulza, attendu vendredi au Honduras, a prévenu de son côté: il ne vient pas «pour négocier».

«Nous allons demander que cesse ce qui est en train de se produire jusqu'à maintenant, et chercher des solutions permettant un retour à la normale», a-t-il indiqué.

L'arrivée de M. Insulza était annoncée jusqu'alors pour dimanche, en compagnie de M. Zelaya. Mais le président destitué n'a plus cité de date en annonçant jeudi qu'il rentrerait accompagné de deux chefs d'Etat au moins, Cristina Kirchner (Argentine) et Rafael Correa (Equateur), et de «plusieurs prix Nobel de la paix».

Confirmant que M. Zelaya serait arrêté «immédiatement» s'il revient, M. Micheletti a fait approuver par le Congrès la suspension de plusieurs libertés constitutionnelles pendant le couvre-feu prolongé jusqu'à la fin de la semaine: la limitation de la durée d'emprisonnement sans jugement, la liberté d'association et de réunion, de mouvement ou de sortie du territoire.

Plusieurs alliés politiques de M. Zelaya ont déjà quitté le pays, selon des sources diplomatiques. L'Argentine a annoncé avoir accordé l'asile diplomatique jeudi à Enrique Flores Lanza, ministre de la Présidence de M. Zelaya.

Tous les ambassadeurs de l'Union européenne en poste au Honduras ont été rappelés et ont quitté le pays, a annoncé jeudi la présidence suédoise de l'UE.

La France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne sont les seuls pays de l'UE représentés au plus haut niveau diplomatique à Tegucigalpa.

Les ambassadeurs de France, d'Espagne et d'Italie ont été «rappelés pour consultations». L'ambassadeur d'Allemagne est parti à la retraite tout récemment, et son successeur «ne sera nommé qu'à la lumière de l'évolution de la situation sur place», selon Berlin.

Les pays d'Amérique centrale et les gouvernements de gauche de la région, comme le Venezuela, Cuba, l'Equateur, la Bolivie et le Nicaragua ont annoncé une mesure similaire. La Colombie a suivi.

La Banque mondiale et la Banque interaméricaine de développement (BID) ont confirmé le gel de leurs lignes de crédit au Honduras.

Toutefois, le Salvador a annoncé jeudi la réouverture au commerce de sa frontière avec le Honduras, après une fermeture de 48 heures décidée par les présidents du Salvador, du Guatemala et du Nicaragua, membres avec le Honduras du Groupe Centraméricain-4 (CA-4).

Les nouvelles autorités honduriennes préparent une «campagne» internationale pour expliquer la «succession constitutionnelle», terme qu'elles voudraient entendre remplacer celui de «coup d'Etat».

Et elles ont entamé mercredi un «dialogue national» ouvert à tous, «y compris ceux qui ont participé à l'administration de M. Zelaya».

Les deux camps ont continué à manifester jeudi: quelque 10 000 pro-Zelaya à Tegucigalpa, plus de 25 000 opposants à San Pedro Sula (nord), la capitale économique, où l'armée a tiré sur des partisans du président destitué, faisant au moins deux blessés, selon une députée pro-Zelaya.

Au pouvoir depuis 2006, M. Zelaya a été destitué - après avoir été arrêté par des militaires et expulsé du pays - pour avoir tenté d'organiser une consultation populaire ouvrant la voie à une possible réélection, un scrutin jugé illégal par la Cour suprême.