La dissidente cubaine Hilda Molina a retrouvé dimanche sa famille en Argentine, après s'être battue pendant quinze ans avec le régime communiste de Cuba pour obtenir l'autorisation de quitter l'île.

Célèbre mondialement pour ses travaux en neurochirurgie, cette femme médecin, âgée de 66 ans, a rencontré son fils et ses petits-enfants au cours de retrouvailles émouvantes à l'aube, à son arrivée à l'aéroport international d'Ezeiza, près de Buenos Aires.

«Merci à tous», a seulement déclaré à la presse Mme Molina, visiblement émue et qui demandait depuis 1994 aux autorités cubaines de pouvoir voyager pour retrouver les siens.

Devant une nuée de journalistes et de caméras, elle a d'abord embrassé ses petits-enfants Roberto Carlos, 13 ans, et Juan Pablo, 8 ans, qu'elle ne connaissait pas, avant d'étreindre son fils, Roberto Quinones, un médecin installé à Buenos Aires et sa belle-fille argentine, Veronica.

Cette dernière, faisant office de porte-parole pour la famille, a expliqué que Mme Molina était très émue et préférait retrouver sa mère avant de parler à la presse.

La mère de Mme Molina, Hilda Morejon, 90 ans, avait été autorisée à quitter Cuba pour l'Argentine en mai 2008. Elle souffre aujourd'hui d'une insuffisance cardiaque.

M. Quinones a «remercié le gouvernement de Cuba, au-delà de la douleur qui a été celle de notre famille pendant toutes ces années». «Cela arrive tard, mais c'est mieux que rien», a-t-il dit à la presse.

Juste avant son départ de La Havane, la dissidente avait assuré quitter Cuba «sans une once de rancune» envers le chef historique Fidel Castro et son frère Raul, auquel il a cédé le pouvoir en juillet 2006 à la suite d'une grave maladie.

Mme Molina n'a toutefois jamais caché que l'interdiction de quitter l'île avait été une «vengeance» à son encontre de la part du régime castriste.

Officiellement destituée en 1994 de son poste de directrice du Centre de restauration neurologique (Ciren), cette ancienne militante du Parti communiste cubain affirme avoir en réalité démissionné en raison d'un conflit entre les pratiques médicales de l'établissement et sa foi catholique.

Bénéficiant d'une autorisation de séjour de trois mois, qui peut être prolongée jusqu'à 11 mois, Mme Molina a souligné ne pas avoir l'intention de s'établir en Argentine, où elle entend demeurer en fonction de l'état de santé de sa mère.

La présidente argentine Cristina Kirchner avait annoncé vendredi que la dissidente venait de recevoir des autorités cubaines «un passeport et l'autorisation pour quitter le pays et se rendre en Argentine».

Mme Kirchner avait salué «le geste du gouvernement de Raul Castro» et «le président de la République de Cuba pendant si longtemps, le commandant Fidel Castro».

Fidel Castro avait fait une visite en Argentine en 2006 mais les relations bilatérales s'étaient par la suite tendues en raison du cas Hilda Molina. Le père de la Révolution cubaine avait même fait état en 2008 de son refus de «céder devant le chantage».

La présidente argentine avait rencontré en janvier les frères Castro lors d'une visite à La Havane où elle avait abordé avec les autorités cubaines le cas de Mme Molina tout en refusant de rencontrer des dissidents.

Le chef de la diplomatie argentine, Jorge Taiana, a estimé que c'était cette «stratégie patiente et persévérante» qui avait fini par payer.

L'Argentine a réclamé à l'instar de tous les pays latino-américains la fin de 47 ans d'embargo américain contre l'île et a soutenu la récente levée de la suspension de Cuba au sein de l'Organisation des Etats Américains (OEA).