Un groupe de navires de guerre russes est entré dans les eaux territoriales vénézuéliennes pour des manoeuvres communes avec la marine du Venezuela, inédites depuis la fin de la guerre froide, ont indiqué des sources gouvernementales à Caracas.

Les navires, dont le croiseur à propulsion nucléaire «Pierre le Grand», le destroyer «Amiral Chebanenko», deux navires d'escorte et cinq avions, arriveront mardi au port de La Guaira, près de Caracas, et à celui de Puerto Cabello, dans l'Etat de Carabobo (nord).

Ces manoeuvres, qui apparaissent comme un défi lancé à l'influence traditionnelle de Washington dans la région, interviennent alors que le président russe Dmitri Medvedev se rend les 26 et 27 novembre en visite au Venezuela, dont le président Hugo Chavez est la bête noire des Etats-Unis en Amérique latine.

Les manoeuvres ne sont «pas une provocation, c'est un échange», a déclaré M. Chavez lundi, rappelant qu'il y avait eu «il y a peu des manoeuvres avec le Brésil, avec la France, avec les Pays-Bas. Maintenant, c'est avec la Russie», a-t-il dit.

Lundi, un porte-parole de la marine russe a confirmé que le détachement russe resterait au Venezuela entre le 25 novembre et le 1er décembre.

Son accostage coïncidera avec l'arrivée, pour une visite historique au Venezuela, du président Medvedev qui rencontrera son homologue vénézuélien mercredi après-midi.

«Ceci n'est une menace pour quiconque. Parler de la Guerre froide est hors de propos. Cela appartient à l'Histoire», avait récemment rassuré M. Chavez.

Dans un récent entretien avec l'AFP, le chef du Commandement stratégique opérationnel vénézuélien, le général Jesus Gonzales, a expliqué que les manoeuvres conjointes consisteraient en des exercices de «navigation, sauvetage et communication» et à encourager les échanges technologiques.

Selon lui, la flotte russe comprend notamment cinq avions et plusieurs navires de moindre taille, tandis que le Venezuela engagera huit avions et onze navires. Au total, 1 150 soldats russes et 600 vénézuéliens participeront aux manoeuvres, a-t-il ajouté.

Selon ce responsable, la Russie «a tendu la main» au Venezuela quand ce dernier cherchait à renouveler son matériel de défense et cette visite «forme une partie de cet échange».

«A d'autres époques, c'était normal et personne ne s'étonnait quand des avions américains atterrissaient. Maintenant les Russes viennent et tout le monde est préoccupé», a souligné le général.

En septembre, deux bombardiers stratégiques russes Tu-160 avait effectué des vols d'entraînement au Venezuela.

Des responsables russes ont estimé que ce rapprochement découlait «de convergences d'intérêt» et ne visait pas à nuire à des Etats tiers.

Cependant, ces manoeuvres coïncident avec les tensions entre Moscou et Washington concernant le projet de déploiement d'un bouclier antimissile américain en Europe de l'Est, auquel la Russie est opposée.

Lundi, le département d'Etat a affirmé qu'il surveillerait «de très près» les manoeuvres mais tout en assurant considérer qu'elles ne représentaient pas une menace.

«Je ne crois pas qu'une poignée de bateaux russes dans (...) les Caraïbes avec les Vénézuéliens soient un motif d'inquiétude pour quiconque», a estimé son porte-parole, Sean McCormack.

Selon Maruja Tarre, une experte vénézuélienne en relations internationales, ces manoeuvres, malgré un «côté folklorique», revêtent «un caractère symbolique» dans une zone que les Etats-Unis considéraient jusqu'à peu comme leur «arrière-cour».

«Il y a une confluence d'intérêts. D'un côté, Chavez veut démontrer qu'il a des alliés puissants et, de l'autre, il est intéressant pour les Russes de mettre un pied dans cette zone dans laquelle, si l'on excepte Cuba, ils n'ont pas eu d'influence», a-t-elle expliqué l'AFP.