Jugeant la mission de paix que s'apprête à confier le gouvernement Trudeau aux soldats canadiens au Mali mal ficelée et dangereuse, le Parti conservateur réclame la tenue d'un débat et d'un vote au Parlement avant le déploiement de troupes dans ce qu'il considère être une zone de guerre où plus de 150 soldats étrangers ont déjà péri.

Si les libéraux refusent de consulter le Parlement, les conservateurs d'Andrew Scheer vont proposer la tenue d'un débat d'urgence dès cette semaine sur cette mission aux contours flous annoncée lundi matin par la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland et le ministre de la Défense Harjit Sajjan.

Les deux ministres ont confirmé que le Canada est prêt à déployer une force opérationnelle aérienne auprès de la mission Multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) pour une période de 12 mois.

La contribution canadienne à cette mission comprendra deux hélicoptères Chinook afin d'assurer une capacité urgente de transport et de logistique et quatre hélicoptères Griffon afin d'assurer une escorte et une protection armées. Combien de soldats seront déployés ? Quand commencera la mission ? Ces questions sont demeurées sans réponses, le ministre Sajjan et le chef d'État-major des Forces armées canadiennes Jonathan Vance affirmant que des discussions doivent avoir lieu à ce sujet avec les Nations unies.

Mais il appert que « de nombreux employés des Forces armées canadiennes accompagneront la force opérationnelle pour offrir du soutien », a-t-on expliqué lundi, et le gouvernement Trudeau compte déployer un nombre important de femmes durant cette mission afin de respecter sa politique d'égalité entre les sexes dans ses déploiements.

Des informations ont filtré lundi selon lesquelles le gouvernement Trudeau pourrait déployer environ quelque 250 soldats en tout. 

 « En tant que membre responsable de la communauté internationale, nous reconnaissons l'importance du travail en collaboration avec nos partenaires pour promouvoir la paix et la sécurité. Je suis certain qu'avec l'appui de nos négociations diplomatiques, le déploiement de la force opérationnelle aérienne pourra améliorer grandement la situation dans la région », s'est contenté de dire le ministre Sajjan.

La ministre Chrystia Freeland a convenu que la situation au Mali est « difficile » et « complexe » et que tous les efforts seront déployés pour assurer la sécurité des troupes. 

En compagne électorale, les libéraux avaient promis de faire en sorte que le Canada participe à nouveau à des missions de l'ONU visant à maintenir la paix. 

« Nous voulons contribuer aux missions internationales de paix et de stabilisation. Nous avons annoncé notre engagement à envoyer une force opérationnelle d'aviation au Mali (...) Nous savons qu'il est important que le Canada soit présent pour assurer la paix et la sécurité à travers le monde», a affirmé lundi aux Communes le premier ministre Justin Trudeau, se disant ouvert à un débat sur cette question au Parlement.

Pour le Parti conservateur, cette mission est mal définie et vise à permettre au premier ministre Justin Trudeau de respecter une promesse électorale et de redorer son blason sur la scène internationale après le fiasco de sa visite en Inde le mois dernier.

 «Il est clair pour nous que l'objectif du premier ministre, en déployant des troupes au Mali, est de regagner des points sur la scène internationale après les échecs récents du Vietnam, de la Chine et de l'Inde. Il veut aussi tenter de remplir sa promesse électorale. Par contre, il faut être clair avec les Canadiens. Le Mali est une zone de guerre. Il n'y a pas de paix à protéger»,  a affirmé le député conservateur Pierre Paul-Hus, tout de suite à après l'annonce.

Son collègue James Bezan, qui est le critique conservateur en matière de défense, a souligné que les règles d'engagement sont totalement différentes lorsqu'il s'agit d'une mission de paix de l'ONU et lorsqu'il s'agit d'une mission de combat. Le gouvernement, selon lui, a l'obligation de clarifier quels sont les objectifs de cette mission et quelles seront les règles d'engagements que devront observer les soldats canadiens.

Selon le politologue et expert en matière d'opérations de paix, Jocelyn Coulon, la décision du gouvernement Trudeau semble avoir été prise de manière précipitée compte tenu de l'absence de détails de la nature de cette mission.

«Cette annonce sent la précipitation. Quand une annonce est planifiée depuis longtemps, ca devrait être plus claire », a dit M. Coulon, soulignant aussi qu'il s'agit tout de même d'un « bon dans la bonne direction ». « Elle donne un peu corps au slogan du gouvernement sur le retour du Canada sur la scène internationale. »