Quatre personnes au moins ont été tuées mardi dans les deux principales villes du Congo lors de heurts entre forces de l'ordre et opposants au référendum constitutionnel de dimanche, qui pourrait permettre au président Denis Sassou Nguesso de se représenter en 2016.

« Le bilan provisoire de cette insurrection organisée et coordonnée » se monte à « quatre morts, dont trois à Brazzaville et un à Pointe-Noire », capitale économique du Congo, dans le sud du pays, a déclaré dans la soirée le ministre de l'Intérieur, Raymond Mboulou, à la télévision publique.

Sept manifestants ont été blessés et trois membres des forces de l'ordre l'ont été grièvement, a ajouté le ministre.

Les violences ont éclaté après l'annonce publique, tôt dans la matinée, de l'interdiction d'un rassemblement contre le référendum annoncé pour le début de l'après-midi par une opposition ayant appelé à la « désobéissance civile » à partir de mardi.

Alors que la quasi-totalité des magasins, écoles et administrations de Brazzaville étaient restés fermés, des jeunes sont sortis dans la rue en incendiant des pneus à Makélékélé et Bacongo - deux quartiers du sud de la capitale réputés proches de l'opposition - ainsi que dans des quartiers ouest.

La police a ouvert le feu à plusieurs reprises. À Pointe-Noire, des jeunes sont également sortis dans les rues en incendiant des pneus et des tirs sporadiques d'armes légères ont été entendus.

À Makélékélé, un journaliste de l'AFP a vu le commissariat du quartier détruit par un incendie. Selon des témoins, deux autres commissariats ont été incendiés dans la capitale avant que le calme ne revienne dans l'après-midi.

Internet et RFI coupés

Vers 17 h 30 (16 h 30 GMT), une centaine de partisans du oui au référendum ont manifesté dans le centre de Brazzaville.

En visite à Kinshasa, sur la rive opposée du fleuve Congo, la sous-secrétaire d'État américaine à la sécurité civile, Sarah Sewall, a exhorté « toutes les parties... à dialoguer et à renoncer à l'action violente ».

L'organisation de défense des droits de l'Homme Amnesty International a appelé pour sa part les forces de l'ordre congolaises à « s'abstenir de recourir à une force excessive ».

Toute la journée, l'internet mobile, les services de SMS et le signal de la radio française RFI - une des stations les plus écoutées du pays - sont restés coupés à Brazzaville et à Pointe-Noire.

Depuis l'annonce début octobre du référendum de dimanche, deux coalitions d'opposition dénoncent comme un « coup d'État constitutionnel » cette consultation sur un projet de nouvelle constitution faisant sauter les deux verrous empêchant M. Sassou de briguer un troisième mandat en 2016.

Pascal Tsaty Mabiala, un des principaux animateurs de l'une de ces plateformes, a déclaré mardi soir à l'AFP : « Nous voulons arriver à (...) une insurrection pacifique populaire » pour empêcher la tenue du référendum.

Joint par téléphone à Sibiti (250 km à l'ouest de Brazzaville), le ministre des Travaux publics, Émile Ouosso, qui faisait campagne pour le « oui » au référendum, a assuré avoir été « pris en otage » pendant près de cinq heures « par des militants opposés au changement de Constitution ».

À Gamboma, dans le centre du pays, l'armée a tiré en l'air a plusieurs reprises pour venir à bout de la détermination de plusieurs dizaines de manifestants anti-référendum, selon des témoins.

Âgé de 72 ans cette année, M. Sassou cumule plus de 30 ans à la tête du Congo. Il a dirigé le pays à l'époque du parti unique, de 1979 jusqu'aux élections pluralistes de 1992, qu'il a perdues. Revenu au pouvoir en 1997 à l'issue d'une violente guerre civile, il a été élu président en 2002 et réélu en 2009.

La Constitution de 2002 limite à deux le nombre des mandats que peut exercer un chef de l'État et interdit d'être candidat à la magistrature suprême toute personne âgée de plus de 70 ans. Ces deux dispositions ont été supprimées dans le projet de loi fondamentale devant être soumis au peuple dimanche.