Quand le Soudan du Sud a proclamé son indépendance, le 9 juillet 2011, tout semblait possible. À quelques jours de son quatrième anniversaire, la plus jeune nation du monde n'a plus rien à célébrer. Au contraire, les informations qui émanent désormais de ce pays ravagé par la guerre civile sont plus horrifiantes les unes que les autres. Explications.

De graves exactions, dénonce l'ONU

La jeune mère allaitait quand les soldats sont arrivés. Ils ont jeté son bébé au sol et l'ont violée à tour de rôle. Une autre femme a été forcée d'empoigner du charbon ardent à mains nues. Publié le 30 juin, le rapport de la Mission des Nations unies au Soudan du Sud (MINUSS) énumère les exactions commises au cours des dernières semaines par les militaires. Des femmes ont été violées puis brûlées vives. Des vieillards ont été abattus. Des villages ont été rasés. Une flambée de violence marquée par «une brutalité nouvelle», s'inquiète la MINUSS. «L'ampleur et le niveau de cruauté qui caractérisent ces témoignages suggèrent une animosité qui dépasse les clivages politiques.»

Des filles violées, des garçons émasculés

Deux semaines plus tôt, l'UNICEF a publié un rapport tout aussi accablant. «La violence contre les enfants au Soudan du Sud a atteint un nouveau sommet dans la brutalité», a dénoncé son directeur, Anthony Lake. «Des garçons ont été émasculés, puis sont morts au bout de leur sang. Des filles d'à peine 8 ans ont été victimes de viol collectif, puis abattues. Des enfants ont été attachés ensemble, puis leurs agresseurs leur ont tranché la gorge. D'autres ont été précipités dans des immeubles en flammes.» Il y a ceux, aussi, qui sont devenus bourreaux. Selon l'UNICEF, «environ 13 000 enfants ont été contraints de participer à un conflit dont ils ne sont pas responsables».

Les racines du mal

Le Soudan du Sud a proclamé son indépendance le 9 juillet 2011, fort des 98,83% des voix obtenues en référendum. À l'époque, le monde rêvait mieux pour ce pays meurtri par des décennies de guerre sanglante contre le pouvoir de Khartoum. Mais la «bonne volonté internationale» a été dilapidée par les dirigeants sud-soudanais et leurs «ambitions égoïstes», a regretté mercredi Samantha Power, ambassadrice des États-Unis aux Nations unies. Une féroce lutte de pouvoir entre le président Salva Kiir, issu de la tribu dinka, et le vice-président Riek Machar, de la tribu nuer, a ravivé les tensions ethniques et entraîné le pays dans l'abîme.

Premières sanctions

Le 1er juillet, le Conseil de sécurité de l'ONU a imposé des sanctions contre six chefs militaires: trois dans le camp de l'armée, trois dans celui des forces de l'opposition. L'organisation a annoncé le gel des avoirs des six hommes, qui sont aussi interdits de vols. Parmi eux, le major général Marial Chanuong Yol Mangok, chef de la garde présidentielle et responsable du massacre de civils d'ethnie nuer à Juba. Dans le camp adverse, le major général James Koang Chuol, dont les forces ont attaqué des camps de l'ONU, des hôpitaux, des églises et des écoles, où elles ont commis des viols et des tortures.