Le gouvernement malien et la communauté internationale intensifiaient lundi les pressions sur la rébellion à dominante touareg du nord du pays pour signer un accord de paix afin d'isoler définitivement les djihadistes qui ont revendiqué l'attentat de Bamako.

Appuyées par le renfort d'enquêteurs étrangers, notamment français et belges, les investigations sur ce premier attentat à frapper des Occidentaux dans la capitale malienne ont permis d'identifier une dizaine de suspects, ont indiqué à l'AFP des sources officielles maliennes.

Le corps de l'un des cinq tués, un Français, Fabien Guyomard, 30 ans, devait être rapatrié lundi soir pour arriver mardi matin en région parisienne.

L'attentat, perpétré samedi au coeur de Bamako dans un restaurant fréquenté par les étrangers et aux alentours, a également coûté la vie à un Belge et trois Maliens et fait huit blessés, dont deux Suisses.

La France, militairement influente dans la zone, a lié cet attentat et les tirs contre l'ONU à Kidal (nord-est) dimanche, qui ont tué un Casque bleu tchadien et deux enfants, aux pourparlers de paix, exhortant la rébellion à parapher l'accord entériné le 1er mars à Alger par le camp gouvernemental.

«Au moment même où nous sommes à quelques mètres de la paix, des forces qui lui sont hostiles essaient d'intervenir pour casser cette perspective», a déploré le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, en visite au Maroc.

Il faisait écho au ministre malien de la Communication Choguel Maïga qui a mis en demeure les rebelles de signer afin de pouvoir «faire la différence entre la mauvaise graine et la bonne».

«Tant qu'une partie de nos frères n'adhéreront pas à l'accord, tout ce qui se passera pourra être interprété. Certains diront que ce sont eux», a insisté le ministre.

En visite au Niger voisin, où il a été reçu dimanche par le président Mahamadou Issoufou, le chef de la Mission de l'ONU au Mali (Minusma), Mongi Hamdi, a également estimé qu'il n'existait «pas d'autre choix, d'autre option que de s'inscrire dans la logique de paix, dans la logique de cet accord».

«Pas céder à la panique» 

L'attentat de Bamako a été revendiqué par Al-Mourabitoune, le groupe djihadiste de l'Algérien Mokhtar Belmokhtar, mais aucun mouvement n'a assumé la responsabilité de l'attaque à Kidal, bastion de la rébellion.

Il «a été planifié par de véritables terroristes organisés. Une dizaine de terroristes sont recherchés», a déclaré à l'AFP une source officielle malienne sous le couvert de l'anonymat, mentionnant un binational russo-malien.

Le conducteur présumé de la voiture du tireur a été identifié, selon une source proche du ministère de la Défense, précisant qu'il s'agirait d'une personne handicapée.

Dans une première réaction publique, le président Ibrahim Boubacar Keïta a assuré dimanche soir que les auteurs de l'attentat «ont échoué et échoueront» à instiller la terreur.

La tension restait néanmoins palpable dans la capitale, surtout parmi la communauté expatriée.

Le lycée français de Bamako, après concertation avec les parents d'élèves, a ainsi reporté de deux jours la rentrée scolaire, prévue lundi, pour renforcer sa sécurité.

«C'est un peu comme chez nous avec Charlie Hebdo», a déclaré à l'AFP un retraité français en vacances, prénommé Pierre, en référence aux attentats meurtriers perpétrés par deux djihadistes le 7 janvier à Paris contre la rédaction de l'hebdomadaire satirique.

«On ne doit pas céder à la panique, sinon ils auront gagné», dit-il, en compagnie de sa femme dans un restaurant très fréquenté par les étrangers, tout en jugeant «normal» de prendre certaines précautions, comme la fermeture provisoire de l'école.

Un Malien, Madou Bomou, approuve l'appel au calme des autorités mais juge qu'«il faut plus de sécurité, au moins aux endroits fréquentés par les Blancs».

Le groupe Al-Mourabitoune a dit vouloir venger un de ses chefs, tué par l'armée française en décembre, mais surtout le prophète de l'islam «de l'Occident mécréant qui l'a insulté et moqué», en allusion aux caricatures publiées par Charlie Hebdo.

Le nord du Mali était tombé au printemps 2012 sous la coupe de groupes djihadistes liés à Al-Qaïda.

Ils en ont été partiellement chassés par l'opération militaire «Serval», lancée à l'initiative de la France en janvier 2013, à laquelle a succédé en août 2014 l'opération «Barkhane», dont le rayon d'action s'étend à l'ensemble de la région sahélo-saharienne, mais des zones entières échappent toujours au contrôle de Bamako.