La commission électorale congolaise a publié jeudi son «calendrier électoral global» tant attendu dans un contexte d'intense crispation politique, et qui fixe la date de la présidentielle au 27 novembre 2016, mais a averti que la tenue du scrutin dépendait de plusieurs «contraintes».

Après les violences meurtrières provoquées en janvier par l'examen d'une nouvelle loi électorale au Parlement, la mise en oeuvre effective de ce calendrier prévoyant la tenue de sept élections en moins de deux ans sera au coeur des enjeux politiques des mois à venir.

L'opposition soupçonne en effet le président Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001, et à qui la Constitution interdit de se représenter en 2016, de chercher à gagner du temps afin d'obtenir un «glissement» du calendrier électoral qui lui permettrait de retarder la présidentielle et de rester au pouvoir, au-delà du terme de son mandat.

«J'ai beaucoup de doutes sur le réalisme de ce calendrier», a réagi à chaud un député de l'opposition sous le couvert de l'anonymat en attendant que le chef de son parti se prononce officiellement : le calendrier étant extrêmement serré, «il suffirait de ne pas respecter les étapes pour tomber dans le glissement».

La prochaine élection présidentielle en République démocratique du Congo est prévue pour le 27 novembre 2016, a annoncé la Commission électorale nationale indépendante (CÉNI), précisant que ce scrutin serait couplé, comme en 2006 et en 2011, aux législatives.

La RDC traverse une crise politique depuis la réélection de M. Kabila en 2011 à l'issue d'un scrutin marqué par des irrégularités massives. Depuis cette date aucune élection n'a eu lieu.

En plus de la présidentielle et des législatives, le calendrier électoral de la CÉNI porte sur l'organisation des scrutins en retard : élections des députés provinciaux et élections locales (25 octobre 2015), élections sénatoriales (17 janvier 2016) et des gouverneurs de provinces (31 janvier 2016), ces deux derniers scrutins devant se tenir au suffrage indirect comme l'élection des maires (7 mars 2016).

La communauté internationale demandait depuis de longs mois la publication de cet échéancier pour décider du soutien financier qu'elle pourrait apporter au processus électoral congolais.

Le rapporteur de la CÉNI, Jean Pierre Kalamba a prévenu que la tenue de tous ces scrutins dépendrait d'un certain nombre de «contraintes» devant être levées avant une «date critique» pour chacune d'elle et dont la responsabilité incombe essentiellement au gouvernement.

Recensement général

Pour la présidentielle et les législatives, il a cité au nombre de ces contraintes «l'exécution du plan de décaissement des fonds» nécessaires à l'organisation des scrutins et à «la mise à jour partielle du fichier électoral», dont le gouvernement devra choisir «l'option méthodologique», ou encore le vote et la promulgation du projet de «la loi de répartition des sièges» des députés sur le territoire national.

Le projet de révision de la loi électorale avait donné lieu en janvier à des troubles au cours desquelles 27 à 42 personnes, selon les sources, ont été tuées, essentiellement à Kinshasa.

Ses détracteurs dénonçaient particulièrement une disposition liant la tenue de la prochaine présidentielle aux résultats d'un recensement général de la population devant commencer en 2015 et qui, selon plusieurs analystes, pourrait prendre jusqu'à trois ans dans un pays grand comme près de cinq fois la France, parmi les moins développés au monde, et où l'autorité de l'État peine toujours à s'affirmer dans l'est face à une cinquantaine de groupes armés encore en activité.

La nouvelle loi a été adoptée le 25 janvier, expurgée de la disposition contestée, et promulguée jeudi. Elle lie cependant potentiellement la tenue des prochaines législatives aux résultats du recensement général. Ce scrutin devant avoir lieu le même jour que la présidentielle, certains juristes et opposants craignent que cette disposition puisse être utilisée pour retarder l'échéance de «l'élection reine».

Interrogé par l'AFP, Bruno Mavungu, le secrétaire général de l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), première force de l'opposition à l'issue des élections de 2011, parti qui n'est plus aujourd'hui que l'ombre de lui-même, a déclaré : «L'UDPS n'a aucune réaction par rapport à cette publication qui ne nous concerne pas».