Dimanche, les chefs d'État de la Francophonie choisiront un successeur à Abdou Diouf lors d'un sommet qui se tient à Dakar. Entrevue avec Henri Lopes, un candidat africain qui espère devenir le nouveau secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie, poste que convoite aussi l'ancienne gouverneure générale du Canada Michaëlle Jean.

Le premier secrétaire général de la Francophonie était un Égyptien. Le deuxième, un Sénégalais. Le troisième sera un Congolais, s'il n'en tient qu'à Henri Lopes, un des principaux candidats pressentis pour le poste.

L'ancien premier ministre du Congo-Brazzaville avait posé sa candidature en 2002, mais l'avait retirée pour laisser la place à Abdou Diouf, ancien président sénégalais qui dirige l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) depuis 2003.

Cette fois, la rumeur veut que M. Lopes ait le soutien du Sénégal et puisse s'imposer comme le principal candidat africain lors du vote de dimanche au sommet de Dakar.

«Ce serait logique que le poste revienne à un Africain, dit-il. Le français est une langue africaine. La langue est parlée par plus de gens en Afrique que nulle part ailleurs dans le monde. Nous ne la parlons pas aussi bien qu'en France ou au Québec, mais il nous est impossible de communiquer entre nous sans la parler», soutient-il. Selon la dernière étude de l'OIF, 274 millions de personnes parlent quotidiennement le français. De ce nombre, 54,7% sont en Afrique.

Un apprentissage à ses dépens

Ambassadeur de son pays à Paris depuis 1998, Henri Lopes dit avoir lui-même appris à ses dépens l'importance du français pour ses concitoyens. Lorsqu'il était ministre au Congo-Brazzaville, il a voulu introduire les langues locales dans le programme scolaire, mais il s'est buté à un mur de reproches de la part des enseignants et des parents. «Je pensais qu'ils étaient colonisés jusqu'à la moelle des os. Mais des adultes analphabètes m'ont fait réfléchir. Ils m'ont demandé où étaient les journaux et les livres qu'ils pourraient lire après avoir appris la langue locale», relate-t-il, notant que ce débat a été un moment-clé pour lui. Depuis, Henri Lopes, qui est aussi un homme de lettres, a écrit neuf romans en français. «C'est à l'Université Laval qu'un de mes livres a été étudié en premier», se souvient-il.

Deuxième place pour les Québécois

Si Henri Lopes est convaincu qu'un Africain est à privilégier dimanche lors de la rencontre des chefs d'État qui nommeront le prochain secrétaire général par consensus, il estime que le numéro deux de l'organisation devrait être originaire du Nord. «Il y a une règle non écrite à ce sujet. En ce moment, le numéro deux est un Québécois [Clément Duhaime], et il le fait de manière exemplaire», dit M. Lopes.

Contrairement à Michaëlle Jean, qui a fait la grande tournée des pays africains et d'Asie du Sud-Est pour faire valoir sa candidature, Henri Lopes n'a pas fait campagne. À 77 ans, il estime que son parcours de politicien, d'écrivain et de diplomate parle de lui-même.

Il n'a pas non plus élaboré de programme comme ses concurrents. «Le secrétaire général a la mission d'exécuter le programme qui est mis en place par les chefs d'État. Le secrétaire n'est pas un chef d'État», dit-il.

Hormis Michaëlle Jean, Henri Lopes a comme rivaux trois Africains: l'ex-ministre des Affaires étrangères de Maurice Jean-Claude de l'Estrac, l'ancien président du Burundi Pierre Buyoya et Agustin Nze Nfumu, ex-ambassadeur de la Guinée équatoriale au Royaume-Uni.

Jusqu'à maintenant, les dirigeants africains ne se sont pas entendus sur un candidat unique. «Habituellement, ça se fait à la dernière minute. On ne m'a pas demandé de me désister cette fois.»