Le Sultan de Sokoto, chef des musulmans du Nigeria, a accusé lundi l'armée de fuir lâchement face aux attaques du groupe islamiste Boko Haram et de «terroriser» la population civile dans le nord-est du pays.

«Les soldats prennent leurs jambes à leur cou et abandonnent leur base, leurs armes, leurs munitions et tout leur équipement militaire à l'approche des insurgés», accuse dans un communiqué l'organisation des musulmans du Nigeria (JNI), qui s'exprime au nom du Sultan de Sokoto, Muhammad Sa'ad Abubakar.

«Les forces de l'armée nigériane ne refont surface qu'après la fin des attaques meurtrières, et terrorisent davantage des populations déjà terrorisées, en installant des barrages routiers et en fouillant les maisons», ajoute le texte.

Il s'agit de la plus dure critique jamais prononcée par un dignitaire religieux de son rang à ce sujet.

La semaine dernière, l'Emir de Kano, Sanusi Lamido Sanusi, deuxième autorité musulmane du Nigeria, avait lui aussi mis en doute la compétence de l'armée et affiché son soutien aux miliciens locaux dans la lutte contre Boko Haram.

Ces nouvelles critiques d'un haut dignitaire religieux devraient irriter le président Goodluck Jonathan, déjà en campagne pour sa réélection en février prochain, pour qui ces personnalités ne sont pas censées s'impliquer dans les questions politiques et militaires.

Dans un discours prononcé ce weekend lors d'un déplacement à Atlanta, aux États-Unis, le porte-parole de l'armée nigériane, Chris Olukolade, a accusé les médias étrangers et d'autres «militants» de dénigrer les efforts menés par l'armée nigériane dans le Nord-Est, d'affecter le moral des troupes et de ternir l'image du pays à l'étranger.

Plus de 13 000 personnes ont été tuées depuis le début en 2009 de l'insurrection de Boko Haram, qui se dit désormais à la tête d'un «califat islamique» dans les zones sous son contrôle. Près de 1,5 million d'habitants ont été déplacés par les violences.

L'état d'urgence dans trois États du nord-est du Nigeria, en vigueur depuis mai 2013, a expiré jeudi. Les violences n'ont cessé d'empirer depuis 18 mois dans les États concernés (Borno, Yobe et Adamawa), où au moins une vingtaine de villes sont contrôlées par les islamistes.