Le président mozambicain Armando Guebuza et le chef de la rébellion de la Renamo Afonso Dhlakama ont signé vendredi à Maputo un accord de paix qui met fin à deux ans d'affrontements armés sporadiques et ouvre la voie à des élections en octobre.

Les deux hommes ont apposé leurs signatures sur le document devant une centaine de diplomates et toute l'élite politique mozambicaine rassemblée à la présidence pour une réception et un banquet d'un faste rare.

Cette rencontre entre les deux ex-ennemis scelle un cessez-le-feu conclu le 24 août par leurs négociateurs. Depuis presque deux ans, l'ancien guérillero Dhlakama, qui a fait un retour triomphal jeudi dans la capitale Maputo, avait pris le maquis. Sa dernière entrevue avec M. Guebuza remontait à 2011, en province.

Depuis sa cachette, il exerçait un chantage à l'insécurité sur le gouvernement, accusé de monopoliser le pouvoir et d'accaparer les ressources nationales, sur fond de forte corruption.

«J'espère que l'accord signé aujourd'hui mettra un terme à ce système d'État parti», a-t-il lancé après la signature, dans une attaque politique directe contre le Frelimo au pouvoir. Il a appelé à «une meilleure redistribution de la richesse», notamment après les découvertes de riches gisements d'hydrocarbures.

«Mon expérience ces dernières années m'a rapproché des souffrances du peuple», a-t-il ajouté, en référence à ses deux ans passés dans la brousse.

«Aujourd'hui est un jour très important pour notre peuple», a lancé pour sa part le président Guebuza. «Notre peuple a attendu patiemment ce jour, sachant que les solutions à nos problèmes passeraient par le dialogue».

Quid des armes toujours en circulation?

Après d'innombrables cycles de dialogue politique infructueux, les affrontements militaires avaient connu une escalade en 2013, qui a fait plusieurs dizaines de victimes.

Il a fallu l'intervention de la diplomatie italienne, artisan des accords de paix ayant mis fin à seize ans de guerre civile en 1992, pour sortir de l'impasse.

Cet accord permet au gouvernement de rassurer les investisseurs internationaux. Mais c'est aussi une victoire pour la Renamo qui a su ne pas aller trop loin dans la violence et a obligé le gouvernement à négocier.

Pratiquement dépourvu d'industries et d'infrastructures, le Mozambique est l'un des pays les moins développés du monde, avec une majorité d'habitants pauvre et dépendante d'une agriculture de subsistance.

Mais le pays vit un tournant économique grâce à de récentes découvertes de charbon et de gaz. Le Mozambique pourrait prétendre au quatrième rang mondial de la production gazière, derrière la Russie, l'Iran et le Qatar, si ses réserves s'avèrent commercialement viables.

L'accord de cessez-le-feu, dont les conditions n'ont pas toutes été dévoilées, doit permettre de tenir sans encombre les législatives et la présidentielle du 15 octobre, sur la base d'un nouveau code électoral. Mais il ne règle pas tous les problèmes.

Il prévoit l'intégration dans l'armée des combattants de la Renamo.

Mais comment va réagir la Renamo si comme beaucoup le prédisent, un autre parti, le MDM, lui ravit la place de deuxième parti politique et de première force d'opposition? Et surtout, quid des armes toujours en circulation au Mozambique?

En 1995, trois ans après la fin de la guerre civile, on estimait entre trois et six millions le nombre d'armes légères échappant au contrôle du gouvernement, selon Forquilha Albino, responsable de l'ONG Formicres, qui oeuvre au désarmement des rebelles. Environ deux millions ont été récupérés avant 2005.

«Mais cela reste un problème», souligne M. Albino, précisant que la collecte d'armes et l'identification des caches a recommencé en 2013.

«Cela va prendre du temps pour que le gouvernement parvienne à créer la confiance mutuelle et que les armes puissent être restituées. Le pays est calme en apparence, mais il y a toujours des éléments d'insatisfaction au sein de l'opposition», souligne également la chercheuse Silungile Hlongwa de l'Institut des Études de sécurité (ISS, Pretoria).

Washington s'est félicité de l'accord de paix: c'est une «avancée historique» pour le Mozambique, a estimé le secrétaire d'Etat John Kerry, saluant  les «qualités d'hommes d'État» de MM. Guebuza et Dhlakama.