La Guinée, la Sierra Leone et le Liberia en proie au virus Ebola ont décidé vendredi d'imposer un cordon sanitaire autour de l'épicentre de l'épidémie, une zone située à leur frontière commune, lors d'un sommet régional à Conakry.

La directrice de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), Margaret Chan, participant à la réunion, a pour sa part appelé à une mobilisation internationale contre Ebola, qui «avance plus vite» que les efforts pour l'endiguer, sous peine de «conséquences catastrophiques», dont l'augmentation des risques de contamination hors de la région.

Signe de l'inquiétude d'une propagation mondiale, le président américain Barack Obama a annoncé que certains invités au sommet États-Unis/Afrique de Washington la semaine prochaine seraient soumis à des examens. Et la compagnie aérienne Emirates a suspendu à partir de samedi ses vols vers Conakry, invoquant «la sécurité des passagers et des équipages».

Les présidents guinéen Alpha Condé, sierra-léonais Ernest Bai Koroma et libérienne Ellen Johnson Sirleaf ont décidé de «se concentrer sur les régions frontalières qui comptent pour plus de 70% de l'épidémie» qui a fait plus de 700 morts depuis le début de l'année, a annoncé Hadja Saran Daraba, secrétaire exécutive de l'Union du fleuve Mano, regroupant ces trois pays et la Côte d'Ivoire.

«Ces zones seront isolées par la police et l'armée. La population des zones isolées se verra fournir un soutien matériel», a précisé Mme Daraba au terme de ce sommet, en présence de la ministre ivoirienne de la Santé Raymonde Goudou Coffie.

«Les services de santé dans ces zones seront renforcés pour que le traitement, le dépistage et le traçage des contacts puissent être réalisés efficacement», a-t-elle indiqué.

Mme Chan a remercié les dirigeants des trois pays «pour leur détermination à agir conjointement afin de traiter cette zone en haute priorité».

Auparavant, elle avait dit espérer que «cette rencontre marque un tournant dans la lutte contre l'épidémie», déplorant que «les effectifs actuels de secours nationaux et internationaux soient tristement inadéquats».

La réunion visait à lancer un plan de 100 millions de dollars pour déployer des centaines de travailleurs humanitaires supplémentaires afin de renforcer les quelques centaines déjà sur le terrain, et améliorer la prévention et la détection de cette fièvre hémorragique.

«Ebola est partout»

«Les pays touchés ont fait des efforts extraordinaires et pris des mesures extraordinaires. Mais les besoins créés par Ebola en Afrique de l'Ouest dépassent vos capacités», a dit Mme Chan, annonçant la convocation d'une réunion d'urgence le 6 août pour «évaluer les implications internationales de l'épidémie».

A Monrovia, capitale du Liberia, les rues étaient désertes et les magasins et administrations étaient fermés, en vertu de la décision de la présidente décrétant vendredi «chômé pour permettre la désinfection des bâtiments publics».

«Je suis là pour nettoyer ma boutique au moyen de chlore, de savon et de détergent», a expliqué à l'AFP Mohamed Kanneh, un commerçant de Red Light, le plus grand marché du pays.

«Personne n'a besoin de vous dire qu'Ebola est ici, vous le sentez partout où vous allez», a déclaré à l'AFP Famanta Bears, 34 ans.

La directrice de l'OMS a assuré que «malgré l'absence de vaccin ou de thérapie curative, les épidémies d'Ebola pouvaient certainement être endiguées».

Mme Chan a néanmoins reconnu qu'il s'agissait «de loin de la plus grande épidémie en près de 40 ans d'histoire de cette maladie», y compris en termes de bilan, «avec 1323 cas, dont 729 mortels», soulignant qu'elle «a prouvé sa capacité à se répandre par le transport aérien, contrairement aux précédentes».

L'inquiétude d'une propagation mondiale a crû à la suite de la mort, le 25 juillet, du premier passager d'avion, un Libérien décédé à Lagos après avoir transité par Lomé.

L'Italie a déconseillé vendredi à ses ressortissants tout voyage «non nécessaire» en Sierra Leone et leur a recommandé d'éviter la Guinée et le Liberia, consignes similaires à celles déjà émises par les États-Unis et plusieurs pays européens.

Le Liban, dont plus 20 000 citoyens vivent dans les trois pays touchés, a annoncé vendredi avoir pris des mesures de dépistage auprès des compagnies aériennes et de ses ambassades sur place, ainsi que la délivrance de permis de travail aux ressortissants sierra-léonais, guinéens et libériens.

Le virus, contre lequel il n'existe pas de vaccin, provoque hémorragies, vomissements et diarrhées. Son taux de mortalité varie de 25 à 90%.

Des virologues américains ont cependant dit espérer tester dès septembre un vaccin expérimental qui en cas de succès permettrait d'immuniser dès 2015 le personnel soignant, en première ligne contre l'Ebola.