Le président sud-africain Jacob Zuma était, contrairement à ce qu'il a affirmé, tout à fait au courant des travaux effectués aux frais du contribuable dans sa résidence privée, a indiqué mercredi un ancien député de son parti, l'ANC.

M. Zuma a dit à plusieurs reprises que les travaux dans sa maison de Nkandla (est) lui avaient été imposés pour des raisons de sécurité, et que, n'ayant pas suivi le chantier, il ne pouvait être tenu responsable ni de la nature des aménagements ni de la dérive des coûts.

Le 5 mai, deux jours avant les élections sud-africaines, il avait aussi évoqué à la surprise générale le viol de l'une de ses épouses il y a plusieurs années pour justifier les travaux.

«Le président savait, parce qu'il était là-bas, et qu'il se plaignait. Il disait "s'il vous plaît, ne mettez pas de fenêtre ici, mettez-en là et là"», a indiqué à des journalistes Ben Turok, un vétéran de la lutte contre l'apartheid qui était député ANC dans la législature sortante.

Jacob Zuma se plaignait notamment de la lenteur des travaux, a-t-il précisé, selon l'agence Sapa.

«Nkandla est bien sûr un problème pour l'ANC. Il y a un grand malaise... C'était la pagaille!»

Ben Turok, né en 1927, va quitter la vie politique. C'est la première fois qu'une voix de l'ANC brise le silence, le parti dominant ayant fait bloc autour de son président pendant la campagne.

Les travaux de la résidence de Nkandla ont coûté plus de 22 millions de dollars à l'État. Dans un rapport explosif, la médiatrice de la République a dénoncé la dépense, affirmant qu'une grande part du chantier n'avait rien à faire avec la sécurité.

Interrogé sur les énormes dépenses pour bâtir notamment une piscine, un amphithéâtre, un enclos à bétail et un poulailler, le président avait encore interrogé l'avant-veille des élections : «Pourquoi devrais-je être poursuivi si quelqu'un a gonflé des factures?»

Sommé de répondre après le rapport de la médiatrice, M. Zuma a dit vouloir attendre un autre audit, qui doit être compilé par une commission qu'il a nommée. Le Parlement a lui aussi mis sur pied un comité, mais la majorité de ses membres (ANC) ont fait valoir qu'ils n'avaient pas le temps d'étudier l'affaire avant les élections.

Bien qu'en légère baisse, l'ANC a largement gagné les élections sud-africaines du 7 mai, avec 62,15 % des voix. Le parti de Nelson Mandela est au pouvoir depuis la fin de l'apartheid il y a vingt ans.