Le président algérien Abdelaziz Bouteflika a nommé lundi le premier gouvernement de son quatrième mandat, sans avoir réussi à intégrer l'opposition comme cela était souhaité par son premier ministre Abdelmalek Sellal désigné, lui, le 28 avril.

Dans cette nouvelle équipe de 34 membres dont sept femmes, et dominée par des technocrates, les principaux ministres conservent leurs postes.

Ramtane Lamamra, diplomate de carrière ayant notamment été ambassadeur à Washington, reste aux Affaires étrangères. Tout comme Tayeb Bélaïz à l'Intérieur, Tayeb Louh à la Justice, Youcef Yousfi à l'Énergie et le général Ahmed Gaïd Salah, à la Défense avec le rang de vice-ministre, la fonction de ministre étant assurée par le chef de l'État.

Parmi les partants figure la ministre de la Culture Khalida Toumi, ex-opposante et ancienne égérie des féministes algériennes, devenue partisane acharnée de M. Bouteflika qui lui a ouvert en 2002 les portes du gouvernement. Elle est remplacée par une autre femme, Nadia Labidi, cinéaste et enseignante à l'Université d'Alger.

Le ministre des Finances, Karim Djoudi, n'a également pas été reconduit, des sources informées assurant qu'il avait demandé son départ pour des «raisons de santé». Il est remplacé par Mohamed Djellab, anciennement ministre délégué au Budget.

Parmi les nouveaux venus figure la ministre de l'Éducation nationale, Nouria Benghebrit, une autre universitaire qui dirigeait un centre de recherche en anthropologie.

Le plus jeune ministre est aussi une femme, Aïcha Tagabou, 35 ans, nommée au poste de ministre déléguée au Tourisme et à l'Artisanat.

Selon la Constitution amendée en 2008 pour, notamment, lever le verrou de la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels, le gouvernement est chargé de «mettre en oeuvre» le programme du Président de la République.

Réélu le 17 avril dernier malgré de lourds ennuis de santé, M. Bouteflika s'est engagé sur le plan politique à réformer la Constitution en vue de «renforcer la séparation des pouvoirs, conforter l'indépendance de la Justice et affirmer les droits de l'opposition», dont le rôle est mineur dans le pays.

D'ailleurs, des partis d'opposition ont décliné l'offre faite par M. Sellal de faire partie du gouvernement à l'instar du plus vieux d'entre eux, le Front des Forces socialistes (FFS) du chef historique Hocine Ait-Ahmed.

Selon sa direction, le parti a refusé deux postes ministériels préférant se consacrer à la «construction d'un consensus national» et à la «préparation d'une conférence nationale» avec le pouvoir et les autres partis.

Le Parti des travailleurs (PT, trotskyste) a aussi refusé de rejoindre le gouvernement, selon sa porte-parole Louisa Hanoune.

«On prend les mêmes et on recommence»

Le politologue Rachid Tlemçani a qualifié de «non-évènement» la présentation du gouvernement remanié où «les postes de souveraineté et les postes clefs sont toujours détenus par le clan présidentiel».

«Le pouvoir a montré son arrogance à l'égard de l'opposition et des mouvements sociaux», a-t-il commenté.

«Il n'y a aucune signification politique si ce n'est que l'on continue sur la même voie», abonde le politologue Rachid Grim, «on prend les mêmes et on recommence».

Artisan de la réconciliation nationale mise en oeuvre après une décennie de guerre civile, M. Bouteflika entend poursuivre ce projet, car «ni la démocratie, ni le développement, ni aucune autre ambition nationale ne pourront avancer sans stabilité interne, sans une entente nationale forte», a-t-il assuré lors de sa prestation de serment.

Sur le plan économique, M. Bouteflika doit s'atteler à diversifier une économie qui reste tributaire du pétrole et du gaz : les hydrocarbures représentent 96 % des exportations et 40 % du PIB dans le pays.

Le prochain programme quinquennal d'investissement public «sera dense (et) au profit de tous les secteurs et de toutes les régions du pays», vaste comme quatre fois la France, a assuré M. Bouteflika qui a promis de continuer à solliciter le concours des partenaires étrangers.