La présidente centrafricaine a déclaré lundi qu'elle souhaitait une prolongation de l'intervention militaire française dans son pays jusqu'en 2015, trois jours après l'annonce par Paris de l'envoi de renforts pour une mission «plus longue que prévu».

«La présidente de transition (Catherine Samba Panza) nous a dit qu'il faut qu'ils (les soldats français) restent jusqu'aux élections, c'est-à-dire le début 2015», a déclaré la présidente de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale -la chambre basse du Parlement français-, Elisabeth Guigou, qui conduit une délégation de neuf parlementaires à Bangui, et qui a rencontré la présidente lundi matin.

Au moment du déclenchement de l'intervention française, début décembre, le président François Hollande avait évoqué une opération «rapide», mais samedi toutefois, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian a jugé que l'opération serait «plus longue que prévu».

Vendredi, Paris a décidé, à la demande notamment du secrétaire général des Nations unies Ban Ki Moon, d'envoyer 400 soldats supplémentaires, ce qui portera à 2000 hommes les effectifs militaires français dans le pays.

L'Assemblée nationale française doit se prononcer par un vote le 25 février sur la prolongation au-delà de début avril de l'opération, qui a pour mission de rétablir la sécurité en Centrafrique, plongée dans le chaos et des violences intercommunautaires.

«La solitude française doit cesser» 

Pour le principal parti d'opposition UMP, le député Pierre Lellouche a fait état à Bangui de «beaucoup d'interrogations». «Quel est l'objectif fondamental de cette mission?, s'est-il interrogé.

«Quand est ce qu'on en sort et comment? Qui sont les alliés de la France dans cette affaire?», a-t-il encore demandé, ajoutant que «la solitude française doit cesser dans ce type d'opérations».

«La France ne peut pas tout faire toute seule» a également dit Mme Guigou. «Il est impératif qu'il y ait des renforts de l'Union européenne. Il est prévu jusqu'à 900 personnes, il faudrait qu'elles arrivent rapidement», a-t-elle souhaité.

L'UE envisage de déployer un millier de soldats en Centrafrique avait annoncé vendredi le chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, sans donner de date.

A cet égard, la Finlande a fait savoir qu'elle pourrait à elle seule dépêcher jusqu'à 110 hommes dans ce cadre.

«Ce pourrait être un chiffre compris entre 20 et 110», a déclaré lundi le ministre finlandais des Affaires étrangères Erkki Tuomioja après avoir rencontré à Paris son homologue français Laurent Fabius.

Mais d'après le président congolais Denis Sassou Nguesso, médiateur dans la crise en Centrafrique, qui s'exprimait dans un entretien avec Le Figaro, «pour avoir une présence dans tout le pays, il faudrait un contingent international d'au moins 10 000 hommes en tout, contre 6000 actuellement».

«L'opération française change de nature de fait, a estimé le député centriste (UDI) Philippe Folliot. Au début, c'était une opération pour stopper les massacres et ça devient une opération d'accompagnement jusqu'aux prochaines élections». Cela suscite des «interrogations sur le financement de l'opération et la nécessité qu'elle devienne une opération réellement multinationale, a-t-il insisté.

Les Français se déploient en province

Dans des localités de province, la situation demeure extrêmement tendue, notamment à Bang (ouest), où, selon Florent Geel, directeur Afrique de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) en mission à Bangui, trois attaques imputées par des sources locales à d'ex-rebelles Séléka ont été menées depuis le 13 février, faisant au moins 22 morts.

Principalement concentrée dans Bangui, en proie à des violences intercommunautaires, la force française Sangaris a accéléré son déploiement en province ces dernières semaines.

Depuis le 12 février, les 150 soldats (dont trois femmes) du 3e escadron du 1er régiment de hussards parachutistes (RHP) de Tarbes, dans le sud-ouest de la France, appuyés par une section d'infanterie, ont pris position à Berbérati, deuxième ville de Centrafrique, située à 600 km au sud-ouest de la capitale.

Occupée pendant des mois par les combattants en majorité musulmans de la Séléka, au pouvoir à Bangui de mars à janvier, Berbérati est tombée le 8 février sous la coupe de la milice d'autodéfense antibalaka, composée de chrétiens animistes,  aujourd'hui accusée d'atrocités à l'encontre des populations musulmanes.

La lutte contre les antibalaka, auxquels la présidente de transition a promis de «faire la guerre», est devenue l'une des priorités de la force internationale.

«L'action militaire à Bangui est terminée», a déclaré dimanche le général Francisco Soriano, chef de l'opération Sangaris, rappelant que la sécurisation de la capitale était désormais essentiellement aux mains de la force africaine Misca (5500 hommes).

Six semaines après l'arrivée de 1600 soldats français en Centrafrique, les unités de combat de Sangaris, initialement concentrées dans la capitale, sont aujourd'hui déployées «pour moitié à Bangui et pour moitié en province», a-t-il dit.