Les attaques meurtrières contre des écoles et les menaces contre des professeurs, qui se sont multipliées cette année, mettent en péril l'éducation dans le nord du Nigeria, dénonce Amnistie Internationale dans un rapport publié vendredi.

«Cette année, au moins 70 professeurs et un grand nombre d'élèves ont été massacrés et beaucoup d'autres ont été blessés. Au moins 50 écoles ont été brûlées ou très endommagées alors que 60 autres ont été forcées de fermer», dénonce l'organisation de défense des droits de l'homme dans un communiqué qui accompagne le rapport.

Ce rapport sort moins d'une semaine après une nouvelle attaque du groupe islamiste Boko Haram dans le dortoir du collège d'agriculture proche de Damaturu, la capitale de l'État de Yobe (nord-est), au cours de laquelle quarante élèves ont été tués.

Boko Haram - dont le nom signifie «l'éducation occidentale est un péché», en langue haoussa - est responsable de nombreuses attaques visant des écoles, des universités et des collèges dans le nord du pays au cours de son insurrection déclenchée depuis près de quatre ans.

«Entre 2010 et 2011, les attaques avaient lieu quand les écoles étaient fermées, la plupart du temps, alors que depuis début 2013, elles sont plus ciblées et plus violentes», dit le communiqué.

D'après ce nouveau rapport, «le plus grand nombre d'attaques a eu lieu dans l'État de Borno», fief historique du groupe extrémiste. Dans cet État, au moins 15 000 enfants ont été obligés d'arrêter l'école, selon le rapport.

L'ONG «recommande aux autorités nigérianes de fournir une meilleure protection aux écoles et de s'assurer que des enquêtes sont menées sur ces attaques».

Il cite également le syndicat nigérian des professeurs, selon lequel 1.000 enseignants ont dû quitter leur poste dans le nord du pays depuis 2012. Des enseignants disent avoir reçu des menaces et des intimidations de la part des membres de Boko Haram.

Un professeur du nord de l'État de Borno cité par Amnistie raconte que deux islamistes sont entrés chez lui en pleine nuit et l'ont menacé avec une arme devant sa femme et ses enfants, lui demandant d'enseigner en arabe et non en anglais.

Selon ce professeur, dont le nom n'est pas mentionné, des membres de Boko Haram se tiennent parfois devant les salles de classe, dans certains villages, pour contrôler le contenu des leçons. «C'est comme enseigner sous la menace d'une arme», dit-il.

L'armée mène une offensive depuis la mi-mai dans la majeure partie du Nord-Est, où l'état d'urgence a été décrété, pour tenter de mettre fin à l'insurrection de Boko Haram. Selon le rapport, l'état d'urgence a participé à la baisse de la fréquentation des écoles, en rendant les déplacements plus difficiles.

Boko Haram revendique la création d'un État islamique dans le nord du Nigeria, majoritairement musulman, au contraire du sud, à majorité chrétienne.

Les attaques du groupe extrémiste et leur répression sanglante ont fait au moins 3.600 morts depuis 2009 selon l'ONG Human Rights Watch.