Des affrontements armés ont éclaté vendredi au coeur de la capitale nigériane Abuja entre membres présumés du groupe islamiste Boko Haram et forces de l'ordre, faisant un nombre indéterminé de morts et de blessés.

Il s'agit de la première attaque de Boko Haram depuis plusieurs mois dans la capitale fédérale, les islamistes concentrant habituellement leurs meurtrières opérations armées dans le nord-est musulman du pays.

Ces nouvelles violences, dans une métropole pourtant placée sous haute protection policière, surviennent quelques jours à peine après une autre attaque attribuée à Boko Haram dans le nord-est, ayant fait au moins 87 morts.

Les épisodes sanglants de ces dernières semaines au Nigeria - pays le plus peuplé d'Afrique avec plus de 160 millions d'habitants et premier pays producteur de brut en Afrique - jettent un doute sur les affirmations de l'armée qui soutient avoir réussi à affaiblir l'insurrection islamiste active depuis quatre ans.

Agissant sur des renseignements fournis par des hommes de Boko Haram en détention, les forces de sécurité se sont rendues dans la nuit de jeudi à vendredi à Abuja derrière la résidence des parlementaires fédéraux, dans le quartier d'Apo, où était censée se trouver une cache d'armes, a déclaré Marilyn Ogar, porte-parole des services de renseignement nigérians, dans un communiqué.

Caches d'armes islamistes

Peu après minuit, selon la même source, les membres des forces de l'ordre ont commencé à «creuser à la recherche des armes» dans le sol d'un bâtiment de deux étages en construction.

C'est à ce moment-là que les policiers ont «été pris sous des tirs nourris (...) provenant d'éléments de Boko Haram présents dans la zone, ce qui a entraîné une réponse immédiate des forces de sécurité», selon la porte-parole.

«Plusieurs personnes ont été blessées et 12 autres ont été arrêtées en relation avec cet incident», a précisé Mme Ogar.

De son côté, la porte-parole de la police, Hyelhira Altine Daniel, a déclaré à l'AFP que «des morts ont été signalés» suite à cet incident, sans toutefois donner de bilan précis.

Boko Haram, qui revendique la création d'un État islamique dans le Nord -majoritairement musulman- a déjà mené des attentats dans la capitale nigériane, située dans le centre du pays, notamment au siège des Nations unies, dans les bâtiments d'un grand quotidien national et dans un centre commercial.

Abuja a été placée sous haute surveillance depuis l'attentat contre le siège de l'ONU qui avait fait 25 morts en 2011: des postes de contrôle ont notamment été installés devant tous les bâtiments gouvernementaux.

Le Nigeria a lancé en mai une offensive militaire dans le nord-est du pays, vaste région placée sous état d'urgence, dans l'espoir de mettre fin à l'insurrection islamiste.

L'armée soutient que cette offensive a affaibli le groupe Boko Haram, dont le nom en langue Haousa signifie «l'éducation occidentale est un pêché».

Le nombre d'attaques commises par le groupe islamiste notamment contre des églises ou des bars a diminué dans un premier temps, mais les violences n'ont pas cessé pour autant et semblent à nouveau s'intensifier.

Des attaques particulièrement violentes ont notamment eu lieu contre trois écoles, faisant plusieurs dizaines de morts.

Canons anti-aériens

Mardi soir, au moins 87 personnes ont été tuées à Benisheik, une ville reculée de l'État de Borno, où des insurgés lourdement armés ont débarqué déguisés en soldats, dans un convoi de camions.

Les assaillants ont installé des barrages et ils ont ouvert le feu sur de nombreux automobilistes et des piétons qui tentaient de les franchir, laissant plusieurs cadavres jonchant les trottoirs et des dizaines de maisons brûlées.

Selon Saidu Yakubu, de l'agence de protection de l'environnement dans l'État de Borno, 87 corps ont été retrouvés, mais le bilan pourrait encore s'alourdir.

Selon une source sécuritaire à Beinisheik, les assaillants islamistes étaient munis de «canons anti-aériens».

Ces détails concordent avec d'autres témoignages selon lesquels Boko Haram est de mieux en mieux équipé depuis quelques mois.

Pour le porte-parole de l'armée, Ibrahim Attahiru, contacté vendredi par l'AFP, la police à Benisheik «a été dépassée par cette attaque». Mais il a refusé de commenter des témoignages selon lesquels l'armée, à court de munitions, aurait dû battre en retraite.

Les attaques menées par Boko Haram et leur répression souvent brutale ont fait au moins 3600 morts depuis 2009, selon Human Rights Watch.

Mais ce bilan a sans doute déjà grimpé depuis la dernière estimation de l'ONG, au vu des nombreuses attaques de ces dernières semaines.