L'ex-chef rebelle Michel Djotodia a prêté serment dimanche pour devenir le sixième président centrafricain, ouvrant formellement une période de transition de 18 mois devant mener à des élections, dans un pays qui s'enfonce dans la violence et est menacé d'une crise humanitaire majeure.

Près de cinq mois après sa prise de pouvoir à Bangui, M. Djotodia a prêté serment sur la Charte de transition, document qui fait office de Constitution depuis le renversement de François Bozizé.

La cérémonie à l'Assemblée nationale s'est déroulée en présence du président congolais Denis Sassou Nguesso, médiateur dans la crise centrafricaine, et du chef de l'État tchadien Idriss Déby Itno, président en exercice de la Communauté économique des États d'Afrique centrale (CEEAC).

«Moi, Michel Djotodia Am Non Droko, je jure devant Dieu et devant la nation, d'observer scrupuleusement la Charte constitutionnelle de transition, de garantir l'indépendance et la pérennité de la République, de sauvegarder l'intégrité du territoire, de préserver la paix, de consolider l'unité nationale, d'assurer le bien-être du peuple centrafricain, de remplir consciencieusement les devoirs de ma charge, sans aucune considération d'ordre ethnique, régional, religieux et professionnel», a déclaré le nouveau dirigeant.

Cette prestation de serment clôt l'organisation du dispositif institutionnel de transition à Bangui, après la création d'un Parlement provisoire (le Conseil national de transition, CNT), et d'une Cour constitutionnelle de transition.

La mise en place de ces organes avait été réclamée par les chefs d'État de la CEEAC lors d'un sommet en avril pour donner une assise juridique au nouveau régime.

Dans un communiqué, le Front pour le retour à l'ordre constitutionnel en Centrafrique (Frocca) de M. Bozizé a qualifié la prestation de serment de «mascarade». «Cette prestation de serment est illégitime, car M. Djotodia ne doit sa place qu'à la force des kalachnikovs et des mercenaires étrangers», accuse son texte.

François Bozizé, renversé le 24 mars par la rébellion Séléka, se trouve actuellement en France.

Population apeurée

La prestation de serment ouvre une période 18 mois au terme de laquelle M. Djotodia s'est engagé à organiser des élections générales.

La tâche du nouveau président s'annonce particulièrement lourde, car la Centrafrique s'enfonce jour après jour dans la violence avec des exactions perpétrées contre la population par des combattants issus des rangs de l'ex-coalition rebelle.

Même si des tirs d'origine indéterminée ont encore été entendus dans la nuit de samedi à dimanche à Bangui, la situation semble se stabiliser dans la capitale où une force africaine a commencé à se déployer.

En province, en revanche, des zones entières échappent au contrôle des nouvelles autorités, la population vivant dans un «climat permanent de peur» créé par des combattants, selon l'ONU.

Le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon a demandé au Conseil de sécurité d'«envisager les options appropriées, y compris l'adoption de sanctions ou la mise en place d'un comité d'experts, afin de garantir» qu'il n'y ait plus d'impunité pour les auteurs d'exactions.

Le nouveau président s'est engagé publiquement à plusieurs reprises à cantonner et à désarmer ces «éléments incontrôlés», et à mettre fin à l'impunité qui règne dans le pays. Sans succès jusqu'à présent.

Au fléau des exactions s'ajoute pour les 4,6 millions de Centrafricains la menace d'une crise humanitaire et sanitaire majeure, liée pour partie aux pillages généralisés des stocks alimentaires et des centres de santé qui ont suivi la chute du régime Bozizé.

Selon l'ONU, 1,6 million de Centrafricains ont besoin d'une aide d'urgence et 206 000 personnes ont été déplacées, dont 60 000 ont fui dans les pays voisins.