L'état d'urgence en vigueur depuis le 12 janvier au Mali, au lendemain du début de l'intervention armée française contre les jihadistes, a été levé samedi à la veille de l'ouverture de la campagne pour le premier tour de la présidentielle du 28 juillet.

Cette mesure, annoncée par le ministère de la Sécurité, est le signe d'un retour progressif à la normale dans un pays qui vient de connaître la plus grave crise de son histoire récente.

L'état d'urgence, qui instaurait un couvre-feu, interdisait réunions publiques, rassemblements et manifestations de rue de nature à troubler l'ordre public, avait été décrété le 12 janvier, deux jours après l'offensive surprise lancée vers le Sud par des groupes islamistes armés qui contrôlaient depuis neuf mois le Nord du Mali.

Cette offensive avait immédiatement enclenché l'intervention de l'armée française au Mali, en cours depuis le 11 janvier contre les groupes jihadistes et criminels liés à Al-Qaïda, désormais en grande partie chassés du nord du pays.

Quelque 3200 soldats français sont toujours présents au Mali, mais leur nombre va progressivement diminuer, pour ne plus atteindre qu'un millier d'hommes à la fin de l'année.

Ils serviront alors de soutien éventuel à la Mission de stabilisation de l'ONU au Mali (Minusma) qui été mise en place le 1er juillet. D'une capacité actuelle de 6300 soldats ouest-africains et tchadiens, ses effectifs doivent doubler d'ici décembre.

La décision de lever l'état d'urgence, qui avait été reconduit à deux reprises depuis janvier, intervient à la veille du lancement de la campagne électorale du premier tour de la présidentielle.

Mettre fin à la transition

Assurer la sécurité de ce scrutin, en particulier dans le nord du Mali où des éléments jihadistes résiduels demeurent présents et pourraient mener un coup d'éclat à cette occasion, sera le premier grand défi de la Minusma et de l'armée malienne, en pleine recomposition après sa débâcle de 2012.

Cette élection doit mettre un terme à la période de transition qui avait débuté en avril 2012, peu après un coup d'État ayant renversé le 22 mars le régime du président élu Amadou Toumani Touré et précipité la chute du nord du Mali aux mains des jihadistes qui y ont commis pendant neuf mois d'innombrables exactions.

Vingt-huit candidats, dont une seule femme, se présentent à ce scrutin, parmi lesquels les anciens Premiers ministres Ibrahim Boubacar Keita, Cheick Modibo Diarra, Modibo Sidibé et Soumana Sacko, ainsi que Soumaïla Cissé, ancien président de la Commission de l'Union économique et monétaire de l'Afrique de l'Ouest (Uémoa).

Un autre candidat, Tiébilé Dramé, ancien ministre et artisan d'un accord entre le gouvernement de Bamako et la rébellion touareg signé le 18 juin à Ouagadougou, a vivement critiqué la tenue du scrutin si tôt.

Selon lui et plusieurs analystes, dont ceux d'International Crisis Group (ICG), «les conditions ne sont pas du tout réunies» pour cette élection et cette impréparation risque de conduire à un scrutin «bâclé» et «chaotique».

M. Dramé a annoncé son intention de demander à la Cour constitutionnelle un report de l'élection, avec peu de chances d'être entendu tant le président français François Hollande, présenté à Bamako comme le «sauveur» du Mali, a insisté pour qu'elle ait lieu en juillet.

Un obstacle de taille à la tenue de la présidentielle sur l'ensemble du territoire malien a cependant été levé vendredi avec l'entrée de l'armée malienne à Kidal (nord-est) parallèlement au cantonnement des rebelles touareg du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) qui occupaient la ville depuis février.

Le cantonnement des rebelles et l'entrée de quelque 150  soldats maliens à Kidal, où ils ont rejoint des militaires français de l'opération Serval et Africains de la Minusma, est conforme à l'accord de Ouagadougou du 18 juin.

Entre 100 et 200 personnes hostiles à l'arrivée de l'armée malienne à Kidal ont manifesté samedi dans la ville, «une provocation», selon une source militaire malienne.