Les entrées de la ville de Kairouan étaient bouclées dimanche par la police et l'armée tunisiennes, pour empêcher les militants salafistes jihadistes de participer à un congrès interdit par les autorités, laissant craindre un face-à-face violent.

Le gouvernement tunisien, qui a reconnu début mai la présence de groupes armés d'Al-Qaïda sur son territoire, a décidé d'interdire le rassemblement annuel du mouvement Ansar Ashariaa, le qualifiant de «menace pour la sécurité» du pays.

Des barrages ont été installés sur toutes les routes entrant dans la ville de Kairouan (150 km au sud de Tunis). Les policiers semblaient fouiller en particulier les véhicules dont les passagers sont des hommes portant la barbe, attribut des salafistes.

Les forces de sécurité étaient déployées en nombre dans Kairouan, mais aussi ailleurs dans le pays, comme à Tunis où les patrouilles se sont multipliées depuis vendredi soir notamment dans les quartiers considérés comme des bastions d'Ansar Ashariaa.

Une journaliste de l'AFP et des médias tunisiens ont fait état d'interpellations de militants salafistes à Kairouan et dans d'autres villes.

Ansar Ashariaa, qui a menacé le gouvernement de «guerre» la semaine dernière et est jugé responsable de l'attaque de l'ambassade américaine en septembre, a répété samedi maintenir son congrès.

«Le rassemblement aura lieu», a déclaré à l'AFP Sami Essid, un responsable du mouvement, qui revendique 40 000 militants.

La page Facebook de l'organisation appelle néanmoins ses partisans «à la retenue» et à «ne pas céder aux provocations» de la police.

D'autres sites proches de ce groupe publiaient de leur côté des cartes montrant des itinéraires à emprunter pour contourner les barrages des forces tunisiennes.

Le ministère de l'Intérieur a lui réaffirmé une nouvelle fois samedi soir dans un communiqué que le congrès de Kairouan était interdit et qu'il ferait «respecter la loi».

Les ambassades occidentales ont dans ce contexte demandé à leurs ressortissants de ne pas se rendre à Kairouan ce week-end.

Ansar Ashariaa a appelé ses militants à se réunir pour son congrès annuel face à la grande mosquée de Kairouan, le centre spirituel et religieux de la Tunisie, à partir de 15H00, après la prière de l'après-midi.

Son chef, Saif Allah Bin Hussein dit Abou Iyadh, est un vétéran d'Afghanistan ayant combattu avec Al-Qaïda. Il est en fuite depuis l'attaque de l'ambassade des États-Unis, les autorités le considérant comme l'organisateur de cette manifestation qui avait dégénéré en affrontements (quatre morts parmi les assaillants).

La Tunisie a vu depuis la révolution de 2011 se multiplier les violences orchestrées par la mouvance salafiste. Le pays est aussi déstabilisé par une profonde crise politique et le développement des conflits sociaux face à la misère.

Le parti islamiste au pouvoir Ennahda a longtemps été accusé de laxisme pour avoir toléré les groupuscules salafistes jihadistes. Il a cependant considérablement durci sa position après que seize militaires et gendarmes ont été blessés par des mines posées par des groupes armés traqués à la frontière avec l'Algérie.

L'état d'urgence, qui donne des pouvoirs accrus à l'armée et aux forces de l'ordre, est en vigueur en Tunisie depuis janvier 2011 et la chute du régime de Zine El Abidine Ben Ali.