À Bangui toujours militarisée, le gouvernement de transition s'est réuni vendredi pour la première fois depuis la prise de la capitale par le chef rebelle Michel Djotodia, avec comme feuille de route la mise en place rapide d'un Conseil national de transition (CNT).

Comme pour tourner au plus vite la page des dix années de pouvoir de François Bozizé, renversé par la rébellion du Séléka, dans ce pays qui regorge de richesses - pétrolières, diamantifères et aurifères - les nouveaux maîtres de Bangui affichent leur volonté de «se mettre sans délai au travail».

«Ce premier conseil de cabinet extraordinaire se justifie par la nécessité de se mettre sans délai au travail afin de faire face aux nombreux défis qui se posent aux Centrafricains», a indiqué le gouvernement dans un communiqué.

Le gouvernement - formé le 31 mars, une semaine après la fuite de Bozizé au Cameroun voisin - est dirigé par le premier ministre Nicolas Tiangaye qui a été reconduit à son poste. Il est composé principalement d'opposants, de membres de la rébellion et de la société civile.

«Toutes les entités représentatives de la société centrafricaine» ont pris part à la réunion du cabinet, souligne le communiqué gouvernemental.

Parmi les défis qui se profilent pour le nouveau gouvernement figure la mise en place du CNT, prévue par les chefs d'État d'Afrique centrale réunis cette semaine à N'Djamena.

Le CNT, sera notamment chargé d'élire un président de la République pour moins de 18 mois, et de rédiger une nouvelle Constitution. Cet organe jouera également le rôle législatif d'une Assemblée.

Mais si le principe de son existence est globalement accepté, la forme, le fonctionnement ainsi que la composition du CNT demeurent des inconnues.

«On nous a dit quoi faire, mais pas comment, et le comment, c'est le plus dur», souligne un opérateur économique.

«On discute, on discute»

«Nous travaillons dessus», a déclaré à l'AFP porte-parole du gouvernement, Crépin Mboli-Goumba.

Au Grand Hôtel de Bangui, qui accueille depuis le 24 mars à la fois la présidence et les réunions du gouvernement, le ballet des personnalités s'est poursuivi toute la journée.

«On discute, on discute», plaisante un chef rebelle en saluant un membre de l'Alliance pour la Démocratie et le Progrès, membre de l'ancienne opposition.

Le casse-tête n'est pas simple: le nombre de membres, la représentation de chaque mouvance et le mode de décision restent à déterminer.

Et les membres du Séléka ne cachent pas leur méfiance.

«Tout le monde est d'accord pour que Djotodia soit élu président, mais après il ne s'agit pas d'avoir un CNT où le Séléka serait noyé dans la masse. Nous avons gagné, nous avons les armes», souligne un membre de Seleka.

Les tractations vont bon train tant sur la représentation et les pouvoirs éventuels des membres du Séléka.

Dès la prise de Bangui par le Séléka, Michel Djotodia s'est posé en nouvel homme fort du pays.

Cet ancien fonctionnaire, qui a basculé en 2005 dans la rébellion et qui s'est autoproclamé président le 30 mars, a accepté les recommandations du sommet de N'Djamena mercredi et devrait donc remettre le pouvoir au terme d'une transition de 18 mois, voire plus, et des élections.

Dans la capitale, où la population se remet à peine des violences perpétrées lors de la prise de Bangui, le couvre-feu a été allégé vendredi passant de 21h à 5h au lieu de 19h à 6h mais les pillages se poursuivent sporadiquement.

Dans l'arrière-pays, d'autres scènes de vols sont régulièrement rapportées dans des villes de l'ouest, tandis que le Séléka mène une offensive depuis plusieurs jours contre le groupe rebelle dissident du Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC) d'Abdoulaye Miskine dans le nord-ouest à la frontière camerounaise.

Selon le bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) vendredi, plus de 35 000 Centrafricains se sont réfugiés dans le Nord de la RDCongo depuis le début de la crise en Centrafrique.