Les deux principaux candidats à l'élection présidentielle au Kenya ont participé à leurs derniers rassemblements électoraux samedi, mais les derniers jours de la campagne ont surtout été marqués par une entrevue du premier ministre à un journal britannique qui fait craindre une nouvelle flambée de violence.

Les élections nationales de lundi sont les premières au Kenya depuis que le scrutin de décembre 2007 a dégénéré en affrontements interethniques qui ont fait plus de 1000 morts.

Les dirigeants et les leaders communautaires kényans ont déployé de grands efforts pour s'assurer que les incidents ne se répètent pas cette année, mais plusieurs craignent néanmoins de nouvelles violences.

Dans un article publié samedi, le Financial Times cite le premier ministre Raila Odinga, l'un des deux principaux candidats à la présidence, qui affirme que les violences pourraient être pires qu'en 2007-2008 s'il perd à cause des fraudes. Il dit être au courant que ses opposants prévoient de truquer le vote.

« Je les ai prévenus que les conséquences pourraient être encore pires que la dernière fois. Le peuple ne tolérera pas un autre trucage », a dit M. Odinga, cité par le journal.

Dans une déclaration publiée plus tard samedi, le premier ministre nie avoir parlé de violences dans l'entrevue et se dit victime de diffamation.

Le Financial Times n'a pas diffusé d'enregistrement audio de l'entrevue.

Le vice-premier ministre Uhuru Kenyatta, qui est le principal rival de M. Odinga, a estimé que les paroles de son adversaire étaient « dangereuses et incendiaires » et lui a demandé de se rétracter.

« Tous les candidats à la présidence se sont engagés en public à faire campagne dans la paix et (...) à accepter les résultats dans la paix », a rappelé M. Kenyatta.

Les élections kényanes ont souvent été marquées par les trucages et les tricheries, mais les observateurs internationaux estiment que l'amélioration du système électoral dans les dernières années rendra les fraudes généralisées plus difficiles. De nombreux partisans de Raila Odinga estiment que le président Mwai Kibaki lui a volé les élections en 2007, une croyance qui a provoqué les violences.

Uhuru Kenyatta et son colistier, William Ruto, font face à des accusations de la Cour pénale internationale (CPI), qui estime qu'ils ont été les instigateurs des violences de 2007-2008. Si M. Kenyatta remporte la présidence, il pourrait être forcé de passer la majeure partie de son mandat devant la CPI aux Pays-Bas.

Uhuru Kenyatta est le fils du premier président kényan, Jomo Kenyatta, considéré comme le « père de la nation ».

Des milliers de personnes vêtues de rouge ont participé au rassemblement de M. Kenyatta samedi à Nairobi. Le candidat a accusé son rival de considérer sa victoire comme acquise et a déclaré à la foule qu'il pensait pouvoir l'emporter dès le premier tour.

À environ trois kilomètres de là, des dizaines de milliers de partisans de Raila Odinga se sont rassemblés dans un stade. Des dizaines de drapeaux américains flottaient dans la foule; M. Odinga et le président des États-Unis, Barack Obama, sont issus de la même tribu.

M. Odinga a déclaré à ses partisans que le Kenya stagnait depuis 50 ans à cause du statu quo dans le partage du pouvoir.

« La seule façon de changer les choses, c'est de voter pour les forces du changement », a-t-il dit.

Les candidats à la présidence doivent remporter au moins 50 pour cent des voix pour être élus au premier tour. Il y a huit candidats au total, et il est très probable que MM. Odinga et Kenyatta s'affrontent en duel au deuxième tour du mois d'avril.