Les rebelles centrafricains, confrontés à la force africaine déterminée à les empêcher de marcher sur Bangui, ont annoncé mercredi qu'ils suspendaient leur progression et acceptaient des pourparlers de paix avec le gouvernement centrafricain, qui pourraient débuter le 8 janvier à Libreville.

«Je confirme que nous avons décidé de suspendre l'offensive en direction de Bangui et nous allons envoyer une délégation au Gabon en vue de participer aux pourparlers de paix», a déclaré le porte-parole de la coalition rebelle du Séléka, Eric Massi.

«Normalement, ces négociations doivent avoir lieu le 8 janvier à Libreville. Il semblerait que la date du 8 janvier soit confirmée», a indiqué mercredi une source diplomatique à l'AFP.

Le président congolais Denis Sassou Nguesso dirigera ces pourparlers en qualité de président du comité de suivi chargé de faciliter le dialogue entre les parties en conflit en République centrafricaine, a ajouté la source.

Le porte-parole du Séléka a rappelé que les rebelles exigeaient le départ du pouvoir du président centrafricain François Bozizé.

«Le départ du président Bozizé reste toujours pour nous une exigence parce que nous mettons en doute sa sincérité», a-t-il déclaré.

François Bozizé s'est lui déclaré prêt à un dialogue sans condition en vue de la formation d'un gouvernement d'union nationale.

Au sein de l'opposition centrafricaine, des voix commencent à s'élever pour être associées aux pourparlers.

«Je suis en faveur de pourparlers à Libreville mais j'exige que tous les partis centrafricains soient associés», a déclaré à l'AFP Nelson Ndjadder, coordonnateur et délégué Europe de la Convention patriotique pour le salut wa kodro (CPSK), une composante minoritaire de la rébellion.

Après avoir enlevé plusieurs villes du nord et du centre depuis le 10 décembre face à une armée centrafricaine incapable de lui résister, la rébellion du Séléka campe à Sibut, à 160 kilomètres au nord de la capitale centrafricaine. Dans sa ligne de mire se trouve la ville de Damara, dernier verrou à 75 km de Bangui, où est positionnée la Force multinationale d'Afrique centrale, qui s'est renforcée ces derniers jours.

La Force a clairement prévenu mercredi la rébellion que toute tentative de marcher sur Bangui serait considérée comme «une déclaration de guerre».

«Nous ne cèderons pas Damara, que ce soit clair. Si les rebelles attaquent Damara, c'est une déclaration de guerre, cela veut dire qu'ils ont pris la résolution d'engager les 10 États d'Afrique centrale. Je ne pense pas sincèrement qu'ils en arriveront là», a déclaré mercredi matin à Bangui le général Jean-Félix Akaga, chef de la Force.

Ses effectifs, dont le gros des troupes est tchadien, devraient atteindre 760 hommes à la fin de la semaine, selon une source interne à la Force.

À ces effectifs s'ajoutent 600 soldats envoyés par la France, l'ancienne puissance coloniale, officiellement pour protéger et éventuellement évacuer ses ressortissants.

Le chef de l'État tchadien, Idriss Déby Itno, président en exercice de la Communauté économique des États d'Afrique centrale et allié du président Bozizé, qu'il a aidé à prendre le pouvoir en 2003, avait déjà prévenu lundi que Damara constituait «une ligne rouge à ne franchir par aucune des deux parties».

Les troupes tchadiennes sont officiellement déployées dans le cadre de la Force multinationale d'Afrique centrale, mise en place en 2008 pour aider à la stabilisation de la Centrafrique, et qui était dans un processus de retrait définitif au moment du début de l'offensive rebelle.

Damara, ville d'environ 40 000 habitants, a été presque entièrement désertée il y a six jours, à l'annonce de l'arrivée des rebelles, a constaté un journaliste de l'AFP. Les maisons sont presque toutes abandonnées, les habitants dorment à la belle étoile dans la brousse.

«On a peur des soldats tchadiens comme des rebelles», affirme Anicet Dimanche, vendeur de cigarettes. «Ils volent, ils mangent ce qui est à nous. Ils veulent des femmes».

La situation provoque tensions, incidents et peurs, en province comme dans la capitale.

Quatre personnes, dont deux rebelles, ont été tuées mardi dans le village de Ngakobo, proche de Bambari, après une tentative de pillage d'une sucrerie par la rébellion qui tient la région.

Dans Bangui, de nombreux «patriotes», répondant à l'appel de M. Bozizé, élèvent dès la nuit tombée des barrages, censés prévenir toute incursion rebelle.