Des négociations cruciales se sont ouvertes mercredi pour tenter de résoudre le plus violent conflit social depuis des années en Afrique du Sud qui a fait 44 morts à la mine de Marikana.

Direction, syndicats ainsi qu'une délégation de mineurs non syndiqués ont entamé leurs pourparlers peu avant 9 h GMT (5h, heure de Montréal) à Rustenburg (nord), la grande ville voisine de la mine, théâtre le 16 août de la pire fusillade policière depuis l'apartheid.

Alors que la grève dure depuis presque trois semaines, une cinquantaine de personnes participent à la réunion à huis clos. La direction est sortie à plusieurs reprises mardi, tout comme les syndicats pour consulter leurs troupes, sans pour autant faire la moindre déclaration à la presse.

« La réunion est tendue, mais chacun reconnaît qu'il est nécessaire de trouver une solution. Cela pourrait prendre du temps », a indiqué une source proche du ministère du Travail, qui pilote la négociation.

Une autre source a laissé entendre que les pourparlers dureraient jusqu'à vendredi.

« Je suis très optimiste, car c'est la première fois que toutes les parties se réunissent », avait déclaré à l'AFP l'un des médiateurs, l'évêque Joseph Seoka avant d'entrer en réunion.

Il avait cependant observé à la radio que « la violence pourrait ressurgir si rien n'était fait ».

Le groupe britannique Lonmin, troisième producteur mondial de platine, n'a cependant pas l'intention de parler des salaires, élément déclencheur le 10 août de la grève des foreurs à Marikana, ces hommes qui effectuent le travail le plus pénible sous terre pour extraire le métal précieux.

« On ne peut pas discuter des salaires si les gens font l'objet d'intimidations. Il faut un retour à la normale avant toute discussion », a déclaré à l'AFP une porte-parole, Sue Vey. « Aujourd'hui, c'est le jour de l'accord de paix », a-t-elle ajouté, utilisant un terme en usage dans la diplomatie, pour traduire l'extrême gravité des événements.

Tandis que la direction pose la reprise du travail comme préalable à toute négociation salariale, les grévistes refusent de leur côté de plier, ce qui reviendrait à leurs yeux à trahir leurs collègues morts ou arrêtés il y a deux semaines.

« On a confiance, nos leaders vont convaincre la direction d'en venir à une décision raisonnable. Jusqu'à maintenant, ils n'ont manifesté aucune sympathie à l'égard de nos besoins », a déclaré à l'AFP un salarié, Benzi Tau.

Quelque 260 grévistes ont été arrêtés après la fusillade, sans compter les 78 blessés, également en état d'arrestation.

Le parquet refuse leur libération sous caution, exigeant un complément d'enquête pour identifier les auteurs des meurtres des premiers jours de grève.

Dix hommes, dont deux policiers et deux gardes de sécurité, ont été tués entre le 10 et le 12 août à Marikana. Puis une fusillade a fait 34 morts le 16 août lorsque les forces de l'ordre ont tiré sur la foule des grévistes, armés de lances et de machettes, et d'armes à feu selon la police.

Depuis lundi, un tribunal de la banlieue nord de Pretoria entend les mineurs arrêtés le jour de la fusillade.

L'audience reprendra jeudi, tandis que la mine est toujours en grève (7,7 % de travailleurs sont présents) selon Lonmin, qui n'entend pas payer les jours de grève et estime que certains mineurs sont incités à rester chez eux sous la menace des plus durs.

La situation reste cependant « très calme », selon Lonmin, dont l'action a fortement chuté depuis le début de ce conflit aux fortes résonances politiques.

Le président Jacob Zuma est en campagne pour sa réélection à la présidence de l'ANC en décembre. Mais la tragédie de la mine de Marikana rappelle que M. Zuma peut bien se vouloir le champion d'une redistribution des richesses minières ou foncières, dans les faits, il peine à agir. Son gouvernement était au courant depuis des mois des difficultés socio-économiques des mines de platine, où une grève début 2012 avait fait trois morts.