La direction de la mine sud-africaine de Marikana, théâtre d'une sanglante fusillade policière contre des grévistes le 16 août, cherchait l'apaisement lundi, repoussant d'une journée l'ultimatum lancé aux grévistes pour reprendre le travail, sans toutefois évoquer la question des salaires.

Un peu plus d'un mineur sur quatre seulement était à son poste lundi matin, les autres bravant un ultimatum de la direction qui menaçait de les licencier de ce site d'où Lonmin extrait du platine, métal précieux utilisé dans l'automobile.

Affirmant que l'activité de la mine, située près de Rustenburg (nord), avait repris, le groupe coté à Londres a pour la première fois discuté avec les syndicats, quatre jours après la fusillade qui a fait 34 morts.

«Après des consultations avec plusieurs représentants syndicaux aujourd'hui (lundi), l'entreprise peut annoncer que les mineurs en grève illégale qui n'ont pas repris le travail ce matin ne seront pas licenciés, et qu'il leur a été accordé un jour de plus, à la lumière des circonstances actuelles», selon un communiqué.

L'entreprise n'évoque cependant nulle part les revendications salariales à l'origine de la grève sauvage qui a dégénéré en violences.

Et elle rappelle que son ultimatum n'est pas levé, menaçant les récalcitrants de «mesures disciplinaires». L'expression «menace de licenciement», employé dans les précédents communiqués, a cependant disparu.

Environ un millier d'hommes s'étaient regroupés lundi matin sur le terrain vague ayant accueilli de grands rassemblements ces derniers jours, refusant toujours de reprendre le travail.

«Ils peuvent nous virer s'ils veulent, nous ne retournons pas au travail. (Le président Jacob) Zuma doit fermer cette mine», a dit l'un des mineurs présents, s'adressant à ses collègues.

L'ambiance au cours de cette réunion n'avait plus rien à voir avec celle des jours précédents. La colère était retombée, les hommes ne portaient plus d'armes blanches et le ton était moins virulent.

L'hélicoptère de la police, qui survole le site depuis quatre jours, se tenait cette fois à distance.

«Lonmin s'intéresse plus aux investisseurs qu'à nous», a lancé l'un des orateurs. «Nous sommes traités comme des esclaves. Même Zuma est arrivé ici après le massacre, le massacre par sa police».

«Unissons-nous, personne ne va travailler», a dit un autre, «si nous parlons d'une seule voix, nous serons plus forts».

La direction de la mine devait tenir une conférence de presse conjointe avec les syndicats dans l'après-midi, dans ses locaux de Marikana.

«Mark Munroe, le vice-président de Lonmin pour les activés minières, apparaîtra aujourd'hui (lundi) avec les leaders syndicaux pour lancer un appel au calme conjoint (...) et encourager une plus large reprise du travail», précise le communiqué.

Les grévistes qui avaient déclenché un mouvement sauvage le 10 août étaient environ 3000 au total. Il était impossible lundi de savoir combien parmi eux avaient repris le travail.

Dimanche, ceux que l'AFP avait interrogés avait clairement indiqué qu'ils n'entendaient pas se conformer à l'ultimatum aussi longtemps que la direction n'auraient pas entendu leurs revendications salariales.

Le petit syndicat AMCU, qui avait encouragé la grève sauvage et réclamé un triplement des salaires des mineurs (1500$ contre 500$ environ actuellement), a réuni ses dirigeants lundi.

L'état-major du puissant syndicat des mines NUM était lui aussi en conclave.

Une semaine de deuil national a été décrétée à compter de ce lundi, après ces événements qui constituent le pire massacre policier depuis la fin de l'apartheid. Un débat extraordinaire aura lieu mardi à l'assemblée nationale au Cap.

Au total, 44 personnes sont mortes à Marikana, en comptant les dix hommes, dont deux policiers, tués entre le 10 et le 12 août dans des affrontements intersyndicaux.

La fusillade de jeudi a fait ensuite 34 morts et 78 blessés, alors que 259 personnes ont été arrêtées.