Des partisans de l'ancien leader yéménite Ali Abdullah Saleh ont pris samedi le contrôle du principal aéroport du pays, alors que des chars d'assaut et des véhicules blindés ont occupé le tarmac et obligé les autorités à annuler les vols, au lendemain d'un remaniement militaire lors duquel des commandants influents ont été mis à la porte.

Aux commandes de camionnettes armées de canons anti-aériens, des membres de tribus armés, aux côtés de soldats en uniforme, ont ouvert le feu sur des bâtiments de l'aéroport international de Sanaa, en plus de tirer sur les tours de contrôle du complexe, avant d'encercler l'ensemble des bâtiments, bloquant des routes et repoussant les véhicules de passagers.

Cet affrontement rappelle les défis auxquels fait face le nouveau leader du pays, qui doit trouver le juste milieu entre une promesse de purger l'armée des éléments de l'ancien régime et l'influence toujours marquée de son prédécesseur.

L'enjeu est de taille : la stabilité du plus pauvre des pays arabes, où al-Qaïda pourrait fort bien occuper l'espace géopolitique laissé vacant.

Le nouveau président yéménite, Abed Rabbo Mansour Hadi, a limogé plusieurs généraux et d'autres puissants acteurs de l'ancien régime, vendredi, en tentant de démontrer qu'il respectait ses promesses de réformes pour apaiser les protestataires inquiets que Saleh puisse essayer de renouer avec le pouvoir à partir des coulisses. Pendant ses plus de 30 ans passés au pouvoir, l'ex-président a octroyé des postes clé au gouvernement et dans les services de sécurité à ses proches et à ses proches collaborateurs.

La restructuration a toutefois épargné le fils de l'ancien président, Ahmed, qui a conservé le commandement de la Garde républicaine, puissante et bien équipée, ou son neveu, Yahia, le chef des Forces de sécurité centrales, et le coup de force semble avoir été une tentative d'intimider M. Hadi pour l'empêcher de mettre en place des réformes encore plus importantes qui leurs feraient perdre leur poste.

Les deux hommes ont déployé des troupes pour faciliter le siège de l'aéroport, selon des responsables militaires.

Saleh a été le quatrième leader à être renversé dans la série de révoltes du Printemps arabe, cédant le pouvoir en vertu d'une entente conclue avec les pays du Golfe en vertu de laquelle il a transmis son autorité à M. Hadi, qui était alors son vice-président. L'entente lui a toutefois permis de demeurer à la tête de son parti, de conserver la moitié de ses ministres en place et ne stipule pas qu'il doive quitter le pays; certains craignent qu'il tente un jour de revenir à la tête de l'État.

Plusieurs Yéménites ne sont pas rassurés à propos de ses partisans qui commandent des unités militaires. L'armée a récemment subi plusieurs défaites dans sa guerre contre des militants liés à al-Qaïda qui ont pris le contrôle de plusieurs villes dans le sud du pays, et de nombreux individus croient que les commandants de Saleh visent activement à saboter la campagne.

L'ex-président était un fidèle allié des États-Unis dans la guerre contre la terreur, et les Américains espèrent que M. Hadi soit en mesure de relancer le combat, mais plusieurs responsables des services de renseignements yéménites ont fait savoir que l'instabilité prolongée menaçait cet effort.

Les États-Unis ont versé plus de 326 millions $ US au Yémen pour la guerre contre le terrorisme. Le flot monétaire s'est cependant abruptement tari l'an dernier après l'éclatement de la révolte.