La police nigériane interrogeait samedi plusieurs suspects dont le «cerveau» du rapt d'un Italien et d'un Britannique, tués jeudi dans un raid controversé qui visait à les libérer.

Christopher McManus, Britannique de 28 ans et Francesco Molinara, Italien de 48 ans, deux ingénieurs enlevés en mai 2011 dans le nord-ouest du Nigeria, ont péri jeudi lors d'une opération des forces nigérianes appuyées par des agents britanniques.

Cinq à huit suspects ont été appréhendés, selon des sources sécuritaires nigérianes, et étaient interrogés samedi par les services de rensignements de la police (SSS).

L'un des suspects aurait indiqué que les otages ont été exécutés par les ravisseurs à la vue du déploiement des forces de sécurité autour de la maison où ils se cachaient, à Sokoto (nord-ouest).

«Huit suspects sont détenus en connexion avec l'enlèvement. Ils sont interrogés pour obtenir un tableau complet de toute l'affaire», a indiqué à l'AFP une source sécuritaire ayant requis l'anonymat.

Vendredi, une autre source sécuritaire interrogée par l'AFP avait affirmé que les deux principaux suspects de l'enlèvement, dont son cerveau présumé Abu Muhammad, avaient été arrêtés mardi.

Des renseignement fournis par ces deux hommes avaient permis de localiser les otages à Sokoto, selon cette source qui avait ajouté que trois autres individus avaient été appréhendés jeudi.

Une centaine d'éléments des forces de l'ordre, plusieurs camions militaires et deux hélicoptères avaient encerclé jeudi matin la maison de Sokoto où étaient retranchés les ravisseurs, selon des témoins qui ont fait état d'une fusillade de plusieurs heures.

Cette demeure, visitée par des journalistes de l'AFP vendredi, portait de très nombreux impacts de balles, parfois de gros calibre, et d'importantes traces de sang étaient visibles.

Sokoto est la capitale de l'État du même nom, voisin de celui de Kebbi où avait et lieu l'enlèvement.

«Ceux qui ont été arrêtés en lien avec l'incident ont été transférés hier (vendredi) au QG des SSS à Abuja», a affirmé samedi à l'AFP encore une autre source sécuritaire.

«Au cours de l'interrogatoire, l'un d'entre eux a indiqué qu'ils avaient tué les deux otages à la vue des forces armées car ils n'étaient pas sûrs de survivre à l'assaut», a-t-elle poursuivi.

Le Premier ministre britannique David Cameron, qui a annoncé jeudi soir le décès des otages à l'issue une opération pour laquelle il avait donné son feu vert, avait indiqué que les victimes paraissaient avoir été exécutées par leurs ravisseurs.

Le président nigérian Goodluck Jonathan avait affirmé le même soir que les deux hommes avaient été tués par les preneurs d'otage.

Le groupe islamiste Boko Haram, qui multiplie depuis des mois les attaques meurtrières au Nigeria, a été désigné par le président nigérian comme responsable de l'enlèvement. Mais un porte-parole présumé des extrémistes a fermement nié vendredi soir toute implication.

Selon l'une des sources sécuritaires, Abu Muhammad serait soupçonné de liens avec la branche maghrébine d'Al-Qaïda (Aqmi) et avec Boko Haram.

Rappelant que Boko Haram semble divisé en plusieurs factions, le quotidien nigérian The Nation rapportait samedi qu'Abu Muhammad pouvait être à la tête de l'une de ces factions. Il affirme aussi que les enquêteurs tentaient d'en savoir plus sur un éventuel lien entre les preneurs d'otage et Al-Qaïda.

Beaucoup d'observateurs s'interrogent depuis des mois sur d'éventuels liens entre Boko Haram et Aqmi.

L'opération militaire a provoqué la colère de l'Italie qui a affirmé ne pas avoir été prévenue à l'avance et jugé «inexplicable» le comportement du gouvernement britannique.

Londres a tenté de relativiser l'incident en soulignant n'avoir été en mesure d'informer Rome que lorsque l'opération avait démarré.

Vendredi soir, les deux pays ont finalement réaffirmé dans un communiqué conjoint leur volonté de continuer à coopérer et de partager toutes les informations qui permettraient de faire la lumière sur l'enlèvement et la mort des otages.