Le président Alassane Ouattara a achevé vendredi à Paris une visite d'État de trois jours en «exhortant» les entreprises françaises à revenir en Côte d'Ivoire, après avoir signé un nouvel accord de défense et tourné la page des années de tensions sous Laurent Gbagbo.

Accueilli en grande pompe par son «ami» Nicolas Sarkozy, M. Ouattara a remercié la France pour son intervention militaire lors de la crise post-électorale, estimant qu'elle avait permis d'éviter en Côte d'Ivoire «un génocide pire qu'au Rwanda».

Le refus de Laurent Gbagbo de reconnaître sa défaite au scrutin présidentiel de novembre 2010 avait déclenché une grave crise de décembre 2010 à avril 2011, qui a fait 3000 morts. M. Ouattara a accédé au pouvoir après deux semaines de guerre grâce aux ex-rebelles nordistes et aux bombardements décisifs de la France et de l'ONU.

Nicolas Sarkozy, seul chef d'État occidental à avoir assisté à l'investiture d'Alassane Ouattara en mai 2011, a renouvelé le soutien de la France à la reconstruction et à la réconciliation en Côte d'Ivoire, concrétisé par la signature d'un nouvel accord bilatéral de défense «transparent».

La force française Licorne, qui a atteint 2000 soldats pendant la crise de 2010, n'en comptera à terme que 300 chargés de la formation des forces ivoiriennes, de l'appui à l'ONU et de la protection des ressortissants français, malgré la volonté affichée des nouvelles autorités ivoiriennes d'en conserver plus.

«C'est un accord qui montre que la France est aux côtés de la Côte d'Ivoire dans sa quête de sécurité (et) que l'armée française n'a pas vocation à s'ingérer, ni de près, ni de loi dans les affaires de la Côte d'Ivoire», a tenu à préciser M. Sarkozy.

Mais huit mois après l'accession au pouvoir d'Alassane Ouattara, la France reste inquiète devant la lenteur du processus de réconciliation, après plus de dix ans de crises politiques meurtrières.

Les partisans de Laurent Gbagbo, écroué à La Haye par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes contre l'humanité, ont boudé les élections législatives de décembre et des violences faisant un mort ont émaillé une de leurs réunions samedi.

«Les hommes d'Alassane Ouattara se promènent en armes, les universités ont été fermées par peur de la contestation étudiante... M. Ouattara ne donne pas les signaux qui rassurent, il n'a pas la situation en main, car il a été installé par la force», a dénoncé Koné Katinan, porte-parole de Laurent Gbagbo.

Des propos démentis par Alassane Ouattara, qui a clôturé sa visite par un vibrant appel aux chefs d'entreprises français pour qu'ils s'associent à la «renaissance ivoirienne» et «accélèrent leur retour» en Côte d'Ivoire.

«Je peux vous affirmer que la paix est revenue en Côte d'Ivoire», a déclaré Alassane Ouattara, soulignant le caractère «irréversible» du processus démocratique dans le pays, devant plusieurs centaines de dirigeants français et ivoiriens réunis au siège du patronat français.

«Je vous invite à revenir en Côte d'Ivoire, à y investir massivement et je sais que vous le ferez», a-t-il conclu.

Le premier ministre François Fillon, qui a salué en M. Ouattara «un grand représentant de la démocratie en Afrique» lors d'un entretien suivi d'un déjeuner, a répondu en évoquant «la totale disponibilité des entreprises françaises à investir davantage en Côte d'Ivoire».

Hors pétrole, la France est le premier partenaire économique de la Côte d'Ivoire, première puissance économique d'Afrique de l'Ouest francophone. Même durant les années de tension avec Laurent Gbagbo, les entreprises françaises, des PME aux grandes entreprises comme Bolloré, ont toujours été comme chez elles à Abidjan.

Les entreprises françaises contribuent pour 30% au PIB ivoirien et pour 50% à ses recettes fiscales, a souligné le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, Pierre Lellouche.