Les Algériens tentaient dimanche de reprendre une activité normale après un week-end d'émeutes contre la vie chère ayant fait trois morts auxquelles le gouvernement a répondu dans l'urgence par des mesures destinées à juguler la flambée des prix des denrées alimentaires de base.

Ces violences ont fait trois morts et 800 blessés, dont 763 policiers, selon les derniers chiffres communiqués par le ministère de l'Intérieur qui a aussi annoncé un millier d'interpellations.

En ce début de semaine, le calme semblait revenu dans tous les villes et bourgs où les émeutes ont éclaté, selon des témoins interrogés par l'AFP. À Alger, après quelques hésitations, les commerçants ont commencé à rouvrir leurs locaux.

La baisse des prix promise samedi soir par le gouvernement à l'issue d'une très longue réunion interministérielle n'était pas encore concrétisée.

Le gouvernement a annoncé la suspension temporaire de taxes de l'ordre de 41% dont doivent bénéficier importateurs, producteurs, et distributeurs de produits de première nécessité pour pouvoir répercuter la baisse vers les détaillants.

«J'ai payé 15 dinars (0,15 euro) le croissant que j'achète d'habitude 10 dinars (0,10 euro) et le boulanger a expliqué la hausse par la flambée du prix du sucre», se plaint Mourad, un électricien.

En parallèle, le gouvernement est déterminé à mettre fin aux saccages perpétrés par des bandes de jeunes protestataires. Le ministre de l'Interieur Dahou Ould Kablia a annoncé l'arrestation d'un millier de manifestants, notamment grâce aux images des caméras de surveillance, déployées massivement dans les rues d'Alger depuis six mois.

Les personnes arrêtées, dont de nombreux mineurs, devaient commencer à être jugées, a indiqué M. Ould Kablia, ajoutant que leurs actes «ne resteront pas impunis».

Cette violence a été principalement le fait de jeunes nés dans les années 90, la décennie de confrontations entre les forces de sécurité et les islamistes qui ont fait des dizaines de milliers de morts, commente un ingénieur d'une entreprise de travaux publics installée dans un quartier affecté par les émeutes. «C'est une génération qui a vécu dans un climat de violence banalisée, qui n'a aucun repère», estime-t-il.

En banlieue de la côte est d'Alger, à Borj el Bahri, les émeutiers, le plus souvent des adolescents, se sont acharnés sur les rares bâtiments publics qui s'y trouvent: établissements scolaires, bibliothèque municipale et poste.

Le bâtiment administratif du lycée de cette banlieue a été fortement endommagé et, dans les classes, les équipements pédagogiques ont été détruits. «Nous essayons de remettre de l'ordre pour travailler au moins avec les élèves qui terminent», se désole un professeur face à l'ampleur des dégâts.

«Nous avons une dizaine d'élèves par classe» contre une quarantaine en temps normal, explique-t-il.

Dans d'autres agglomérations, les manifestations de samedi après-midi se sont arrêtées vers 21H00, notamment à Annaba, grande ville de l'Est, où elles avaient repris violemment.

Un médecin parti d'Alger vers Biskra (400 km au sud-est d'Alger) a observé dimanche que la circulation était redevenue normale sur cet important axe routier où des barricades avaient été érigées par endroits durant le week-end.

Des traces de violences étaient encore visibles autour du commissariat de Ain-Lahdjal qui restait sous haute surveillance, a noté le médecin. C'est ici qu'est tombé le premier des trois manifestants décédés, un jeune homme atteint par une balle alors qu'il participait à une tentative d'attaque du commissariat.