Des incidents ont éclaté dimanche au Caire après l'attentat qui a fait 21 morts devant une église d'Alexandrie, un ministre ayant été la cible de jets de pierre et l'imam d'Al-Azhar encerclé dans sa voiture alors que le pays craint une aggravation des tensions.

Dans la soirée, des incidents ont également éclaté à Alexandrie, deuxième ville d'Égypte, où plusieurs centaines de chrétiens coptes ont manifesté devant l'église frappée par un attentat dans la nuit du Nouvel An, avant de mettre le feu à des poubelles, selon un photographe de l'AFP. Samedi, des affrontements avaient déjà opposé de jeunes chrétiens et des policiers.

Au Caire, plusieurs centaines de coptes se sont rassemblés dans l'enceinte de la Cathédrale Saint-Marc, siège du patriarcat copte orthodoxe, harcelant les responsables qui venaient présenter leurs condoléances.

Selon un journaliste de l'AFP, des manifestants ont ainsi jeté des pierres sur Osmane Mohamed Osmane, secrétaire d'État au développement économique, après qu'il eût rencontré le patriarche Chenouda III, alors que des affrontements opposaient d'autres manifestants aux policiers postés à l'extérieur.

Plus d'un millier de manifestants sont ensuite sortis de l'enceinte et se sont répandus dans les rues avoisinantes, perturbant le trafic, donnant des coups sur les capots et jetant des pierres sur les véhicules.

Auparavant, plusieurs dizaines de manifestants ont tenté d'encercler le grand imam d'Al-Azhar, Ahmad al-Tayeb, l'un des principaux responsables religieux musulmans du pays, donnant des coups sur sa voiture alors qu'il sortait d'une visite au patriarche.

Selon la police, un millier de Coptes ont aussi manifesté devant le ministère des Affaires étrangères et les locaux de la télévision d'État.

Dans le sud du pays, des Coptes ont pris à partie un musulman et détruit trois voitures dans le village d'Al-Izziya dans la province d'Assyout, selon un témoin.

Dimanche matin, la presse exhortait chrétiens et musulmans à faire bloc, craignant que le massacre d'Alexandrie ne provoque une escalade des tensions confessionnelles. Les Coptes représentent de 6 à 10% des quelque 80 millions d'Égyptiens.

«Quelqu'un veut faire exploser ce pays» et provoquer «une guerre civile religieuse» en Égypte, affirmait dimanche le quotidien progouvernemental Rose el-Youssef.

Le journal indépendant Al-Chourouq évoquait la hantise d'une guerre civile: «Si le plan (des terroristes) marche comme prévu», l'Égypte pourrait s'embourber dans «un marécage semblable à ce qui s'est passé au Liban en avril 1975».

Les principales personnalités religieuses musulmanes du pays, de même que les Frères musulmans, ont fermement condamné l'attentat.

L'attentat n'a pas été revendiqué, mais la piste d'Al-Qaïda est évoquée par les autorités qui rappellent que l'organisation, qui avait revendiqué l'attentat meurtrier du 31 octobre contre une cathédrale de Bagdad, avait proféré des menaces contre les chrétiens d'Égypte.

Pour le ministère de l'Intérieur, l'attentat est «probablement» l'oeuvre d'un kamikaze portant des explosifs de fabrication locale, mais commandité par «des éléments extérieurs». Le président Hosni Moubarak a lui-même mis en cause des «mains étrangères».

Selon un responsable des services de sécurité, 20 personnes ont été détenues pour interrogatoire, sans preuve de liens directs avec l'attentat.

Le pape Benoît XVI a exprimé dimanche sa «douleur» face à «ce geste lâche de mort». La veille, il avait appelé les dirigeants du monde à protéger les chrétiens. Pour le grand imam d'Al-Azhar, il s'agit d'une «ingérence inacceptable», une accusation rejetée dimanche par le Vatican.

L'Italie a demandé dimanche que la question des violences et discriminations contre les chrétiens dans le monde soit au menu du conseil des ministres européens des Affaires étrangères prévu le 31 janvier.