La Côte d'Ivoire ignorait toujours le nom de son futur chef de l'État à l'expiration, mercredi à 00H00 GMT (19h00, heure de Montréal), du délai légal pour l'annonce des résultats du second tour de la présidentielle de dimanche, entre le président sortant Laurent Gbagbo et l'ex-premier ministre Alassane Ouattara.

À l'heure dite, malgré les appels conjugués de la communauté internationale et de l'ex-premier ministre Ouattara durant la journée, aucune annonce n'était survenue ni au siège de la Commission électorale indépendante (CEI) à Abidjan ni sur la télévision publique, a-t-on constaté.

Environ 40 minutes avant l'expiration du délai, le président de la CEI Youssouf Bakayoko avait affirmé à la télévision que la commission «continuait de travailler» pour annoncer les résultats provisoires, sans s'engager en rien sur la suite du processus.

Désormais, il revient normalement au Conseil constitutionnel de statuer sur les données qui lui seront transmises par la CEI, pour proclamer les résultats définitifs.

Le camp Gbagbo a d'ores et déjà annoncé qu'il comptait sur un recours déposé auprès du Conseil pour faire annuler des votes «frauduleux» dans le nord, tenu par l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN) depuis le coup d'État manqué de septembre 2002.

Le pays, où le couvre-feu qui devait s'achever ce mercredi a été prorogé jusqu'à dimanche, restait donc plongé dans l'incertitude en dépit de la mobilisation de la communauté internationale.

Peu après minuit, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a réclamé la publication «sans plus de délai» des résultats. Plus tôt dans la journée, le président français Nicolas Sarkozy et la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton avaient appelé au respect des délais.

L'ex-premier ministre Ouattara, dont le camp affichait sa sérénité ces derniers jours, avait jugé dans l'après-midi «impératif» que le président de la CEI «proclame immédiatement les résultats provisoires», dans une déclaration faite à Abidjan.

Se disant «inquiet», l'opposant a exhorté son «frère Laurent Gbagbo» à respecter l'appel qu'ils avaient signé ensemble la veille du vote, et dans lequel ils s'engageaient à se plier au verdict des urnes.

Mardi, une altercation était venue illustrer, devant les caméras du monde entier, l'ampleur des tensions au sein de la CEI.

Au moment où son porte-parole Bamba Yacouba allait annoncer de premières indications chiffrées, deux membres de la CEI pro-Gbagbo lui avaient arraché des mains les feuilles de résultats de différentes régions, au motif que ces données n'avaient pas été validées selon les règles, ce que Bamba Yacouba a contesté.

Un porte-parole de M. Ouattara, Albert Mabri Toikeusse, a accusé le président Gbagbo d'être «dans une logique de confiscation du pouvoir», en tentant d'«empêcher» l'annonce des résultats.

Le camp Gbagbo ne cherche «aucunement» à «confisquer le pouvoir» mais «se battra» contre «toute logique d'usurpation du pouvoir», a rétorqué le porte-parole du président-candidat, l'ancien premier ministre Pascal Affi N'Guessan.

«Nous nous battrons jusqu'au bout» pour faire invalider le vote «frauduleux» dans des régions du nord ex-rebelle, notamment celle de Bouaké, fief des FN, a-t-il dit.

Pour y parvenir, le camp présidentiel entend passer par le Conseil constitutionnel, présidé par un proche du chef de l'État. «Au niveau du Conseil constitutionnel tout est encore possible», a-t-il averti.