Les officiers qui ont appelé à la mutinerie contre le régime en place à Madagascar ont affirmé jeudi qu'ils tiendraient bon, en dépit de l'absence de soutien apparent à leur mouvement dans le reste de l'armée.

«Bien sûr ! Rien ne va plus à Madagascar, Ca ne peut plus continuer», a affirmé à l'AFP le chef des mutins, l'ancien ministre des Forces armées et général Noël Rakotonandrasana, interrogé au téléphone quant à savoir s'il poursuivait la mutinerie.

«Je m'adresse au peuple: si vous êtes d'accord avec nous, nous vous invitons à nous rejoindre. Nous appelons aussi les militaires à venir grossir nos rangs ici dans le camp où nous sommes pour parvenir à une solution rapide», a renchéri un autre mutin, le colonel Coutiti Assolant, dans une interview à une télévision privée malgache.

Mais dans les faits, la vingtaine d'officiers en rébellion contre le régime de l'homme fort du pays, Andry Rajoelina, restaient isolés jeudi dans une caserne proche de l'aéroport, à une quinzaine de kms de la capitale Antananarivo, plus de 24 heures après avoir annoncé qu'ils «suspendaient toutes les institutions» de la Grande île pauvre de l'océan Indien, peuplée de 22 millions d'habitants.

La vie, pendant ce temps, suivait son cours habituel dans la capitale Antananarivo, avec ses embouteillages et ses commerçants affairés, sans déploiement visible de forces de l'ordre.

Des discussions se sont poursuivies toute la journée pour trouver une issue pacifique à la mutinerie, lancée le jour d'un scrutin voulu par le régime en place pour faire adopter une nouvelle Constitution.

«Pour l'instant nous n'avons pas l'intention de nous battre entre nous (militaires). Ca passera par des négociations», a déclaré le général Rakotonandrasana.

La tenue de ces discussions a été confirmée, sous couvert d'anonymat, par une source au sein de l'armée régulière malgache. Mais «si les négociations échouent, le régime entrera certainement dans une phase plus dure. Il n'y aura pas de 'grand pardon', des consignes ont été données», a mis en garde cette source.

Les mutins bénéficient de la bienveillance d'une partie au moins de l'opposition politique.

«Si c'est une prise de responsabilité face à (la) situation (à Madagascar), tout citoyen censé ne peut qu'approuver un tel courage», a affirmé à l'AFP Roland Ravatomanga. Ce proche de l'ancien président élu Marc Ravalomanana, chassé par M. Rajoelina en mars 2009 avec le soutien de l'armée, n'a cependant pas explicitement soutenu les mutins.

Au lendemain du referendum constitutionnel, le oui à la nouvelle Loi fondamentale était par ailleurs largement en tête à Antananarivo avec 80,48% des suffrages exprimés et 40,07% de participation, selon des résultats provisoires.

Une très large victoire du oui ne fait aucun doute puisque les mouvances des trois anciens présidents Marc Ravalomanana, Didier Ratsiraka et Albert Zafy, aujourd'hui dans l'opposition, avaient appelé au boycott de la consultation, et le seul enjeu est l'ampleur du taux de participation.

«En voyant tous les gens désireux de voter, le pouvoir a sorti une ordonnance en faveur des non-inscrits et prolongé l'ouverture des bureaux (de deux heures) jusqu'à 18h» (10h heure de Montréal), a expliqué à l'AFP Gisèle Dama Ranampy, membre de la commission électorale.

«De ma vie, je n'ai jamais vu une élection aussi bâclée, c'était la honte totale pour Madagascar», a dénoncé M. Ravatomanga, évoquant de «nombreuses anomalies» dont cette prolongation de deux heures de la durée du scrutin.