Les forces marocaines ont dispersé lundi des milliers de protestataires sahraouis installés dans un camp de toile au Sahara occidental, dans une opération qui, selon Rabat, a fait trois morts.

Le Polisario, organisation qui lutte pour l'indépendance de cette région, a assuré qu'un Sahraoui avait été tué et des «centaines» d'autres blessés dans l'assaut, près de Lâayoune, chef lieu du Sahara occidental sous contrôle marocain.

Dans le même temps, près de New York, le Polisario et le Maroc ont entamé sous l'égide de l'Onu une nouvelle session de négociations sur le statut de cette région disputée, aux confins du Maroc, de l'Algérie et de la Mauritanie.

Un porte-parole de l'Onu a regretté dans un communiqué que cette «opération» ait affecté «l'atmopshère dans laquelle ces discussions se tiennent». Il a appelé «les parties impliquées à exercer la plus grande retenue».

S'exprimant devant le parlement, le ministre de l'Intérieur marocain Taieb Cherkaoui a confirmé la mort de trois membres des forces de l'ordre, «dont un pompier», a-t-il précisé.

Il a assuré que l'intervention contre le camp de toile, qui abritait des milliers de contestataires, avait été «pacifique».

Il a ajouté que l'assaut près de Lâayoune, à 1200 km au sud-ouest de Rabat, avait fait plus de 60 blessés parmi les forces de l'ordre et il a assuré que seuls quatre «civils» avaient été atteints.

Le Front Polisario, joint par l'AFP à partir d'Alger, a fait état de la mort d'un jeune Sahraoui Babi Mahmoud El Guerguar, âgé de 26 ans. Il a accusé les militaires marocains d'avoir tiré «à balles réelles» et d'avoir fait «des centaines de blessés» .

Selon le ministre des Affaires étrangères sahraoui Mohamed Salem Ould Salek, interrogé par l'AFP à Alger, ce camp, baptisé Gdim Izik, abritait 28 000 personnes.

«Vers 6h15 (1h15, heure de Montréal) des hélicoptères ont survolé le campement», a assuré un témoin joint par l'AFP. «Ils ont appelé les femmes et les enfants à quitter le campement en précisant que des autocars sont mis à leur disposition».

Les forces de l'ordre ont ensuite donné l'assaut en utilisant des canons à eau et de violents incidents se sont produits dans la ville même, selon une source officielle à Lâayoune.

Le campement de tentes a été dressé le 19 octobre par des habitants de cette région pour protester contre «la détérioration» de leurs conditions de vie. Selon des ONG sur place, il abritait au moins 12 000 habitants.

La préfecture de Lâayoune a assuré lundi que le «campement a été entièrement démantelé et il n'existe plus aucune tente» sur le site.

Selon un témoin, «le camp est pratiquement dispersé. Les jeunes qui avaient refusé de le quitter ont été dispersés par la force».

Le représentant du Front Polisario à l'ONU, Ahmed Boujari, a estimé peu avant le début des discussions de lundi que les heurts étaient un acte «délibéré du Maroc» visant à saborder les négociations. « J'espère que le Conseil de sécurité de l'ONU se saisira de cette affaire», a ajouté M. Boujari.

La ministre des Affaires étrangères espagnole Trinidad Jimenez a appelé «à la retenue et au calme», depuis la Bolivie où elle est en visite. Elle a souligné la nécessité de reprendre le dialogue «pour éviter que le conflit ne dégénère».

Ancienne colonie espagnole, le Sahara occidental a été annexé en 1975 par le Maroc. Le Polisario, soutenu notamment par l'Algérie, réclame un référendum d'autodétermination sous l'égide de l'ONU, qui donnerait aux Sahraouis le choix entre trois options: indépendance, autonomie sous souveraineté marocaine ou rattachement au Maroc.

Le Maroc soutient l'option d'une autonomie sous sa souveraineté, refusant toute idée d'indépendance.