L'opposante éthiopienne Birtukan Mideksa, emprisonnée depuis deux ans, a été graciée mercredi et a regagné son foyer à Addis Abeba, après avoir «demandé pardon» au premier ministre Meles Zenawi, selon les autorités.

Mme Birtukan, 36 ans, est une figure charismatique de l'opposition et la présidente de l'Union pour la démocratie et la justice (UDJ).

Déjà incarcérée de 2005 à 2007, celle que certains appellent l'Aung San Suu Kyi éthiopienne en référence à l'opposante birmane et prix Nobel de la paix, était en prison depuis décembre 2008, condamnée à perpétuité.

«C'était très dur en prison», a-t-elle déclaré lors d'un bref entretien avec l'AFP.

«J'ai trouvé très difficile d'être seule tout ce temps. Je suis très heureuse d'avoir été libérée», a ajouté l'opposante, qui a passé l'essentiel de sa détention à la prison de Kaliti, en banlieue d'Addis Abeba, où elle ne pouvait recevoir la visite que de sa mère âgée et de sa fille de quatre ans.

«Elle vient d'être libérée. Elle est rentrée chez elle», avait indiqué peu auparavant à l'AFP le secrétaire d'État à la communication Shimeles Kemal.

Dans un communiqué, le ministère de la Justice a expliqué que le président Woldegiorgis «a accordé aujourd'hui son pardon à Birtukan Mideksa suite à une recommandation transmise à son bureau par le Comité fédéral pour les grâces».

«Cette décision est intervenue après une demande formelle soumise par Mme Birtukan au premier ministre Meles Zenawi le 5 septembre», a précisé le ministère.

L'opposante reconnaît dans cette demande avoir menti en déclarant n'avoir pas demandé pardon aux autorités, notamment lors de séjours à l'étranger, ce qui avait justifié pour le gouvernement sa nouvelle incarcération en décembre 2008, a affirmé le ministère.

Mme Birtukan avait été incarcérée en 2005 sous l'accusation de «complot contre la Constitution», à la suite de manifestations violemment réprimées qui avaient suivi la contestation des résultats de l'élection remportée cette année-là par le pouvoir, et qui avaient fait près de 200 morts.

Elle avait été libérée en juillet 2007 en même temps que plusieurs dizaines d'opposants, après avoir bénéficié d'une grâce collective.

En 2007, contrairement à certains de ses camarades qui ont choisi l'exil après leur grâce, Mme Birtukan avait décidé de continuer la lutte politique dans son pays.

Selon le ministère de la Justice, Mme Birtukan a cette fois exprimé ses «profonds regrets pour avoir trompé le peuple et le gouvernement éthiopien en démentant avoir été graciée» à sa demande.

«Je supplie le peuple et le gouvernement éthiopien de me pardonner», a ajouté l'opposante dans sa «demande» à M. Zenawi, toujours selon le ministère.

Emprisonnée, elle n'avait pas pu participer aux élections législatives de mai dernier, qui ont vu la victoire écrasante du parti au pouvoir avec plus de 99% des voix.

En juillet 2008, elle avait été désignée présidente de l'UDJ, devenant ainsi la première femme à occuper de telles responsabilités politiques dans une Ethiopie encore très traditionaliste.

En 2009, les États-Unis, principal allié de l'Ethiopie, s»étaient déclarés extrêmement préoccupés» par le sort de la dirigeante emprisonnée, tandis que la Commission pour les droits de l'homme de l'ONU l'avait qualifiée de  «prisonnière politique».