Face à la paralysie quasi totale des institutions, la Haute cour fédérale du Nigeria a donné vendredi 14 jours au gouvernement pour décider si le président Umaru Yar'Adua, hospitalisé depuis deux mois en Arabie Saoudite, est apte à rester en fonction.

«Le Conseil exécutif de la fédération dispose de 14 jours pour adopter une résolution (...) pour statuer si, au regard de l'absence du Nigeria du président pour raisons médicales depuis le 23 novembre 2009, le président est incapable d'exercer ses fonctions», a déclaré le président de la Haute cour, Dan Abutu.

La cour statuait sur une requête déposée par un ancien membre du parlement, Farouk Adamu Aliyu, visant à investir officiellement le vice-président Goodluck Jonathan comme «président par intérim».

Au pouvoir depuis mai 2007, Umaru Yar'Adua, malade, est hospitalisé à Jeddah pour une affection cardiaque grave et des problèmes rénaux.

Le ministre de la Justice Michael Aondoaaka a immédiatement déclaré que le gouvernement «se pliera à l'arrêt de la Cour».

«Dans un délai de 14 jours, le conseil exécutif de la fédération examinera et adoptera une résolution sur l'état de santé du président», a-t-il déclaré une fois le jugement rendu.

Jusque-là, les durs du régime avaient toujours refusé une telle éventualité, assurant que le président était tout à fait à même d'exercer ses fonctions, même depuis un lit d'hôpital lointain.

La Haute cour s'est basée sur l'article 144 de la Constitution stipulant que le président doit cesser ses fonctions si les deux tiers des membres du conseil exécutif de la fédération adoptent une résolution le déclarant «incapable d'assumer ses fonctions», après vérification par une équipe de cinq médecins désignés par le président du Sénat.

L'avocat de l'ancien parlementaire, Me Bamidele Aturu, a espéré que le gouvernement «prendra le chemin de la rectitude, du respect de la loi, de la constitution» pour «sauver notre pays de l'anarchie et du chaos».

Depuis son hospitalisation en urgence à Jeddah, aucune photo ni vidéo du président n'a été diffusée. On l'a seulement entendu une seule fois le 12 janvier. Il avait alors assuré dans un bref entretien à la BBC qu'il allait «mieux», mais d'une voix extrêmement faible.

Le Nigeria est déjà entré depuis des semaines dans l'«après-Yar'Adua» et de plus en plus de voix se sont élevées pour demander qu'il cède le pouvoir afin de mettre fin au «vide» à la tête du pays.

Deux manifestations ont déjà rassemblé plusieurs milliers de personnes à Abuja et Lagos et plusieurs influents politiciens ont réclamé sa démission, notamment son prédécesseur Olusegun Obasanjo.

«Si vous prenez un travail, élu ou nommé, et qu'ensuite votre santé commence à vous faire défaut et que vous n'êtes plus capables d'assurer, que vous n'êtes plus capables de satisfaire ceux que vous êtes supposés servir, alors il y a un chemin de l'honneur et de la moralité. Si vous ne savez pas ça, alors vous ne savez rien», a déclaré l'ancien général-président.

C'est pourtant lui qui avait choisi Umaru Yar'Adua pour lui succéder et être le candidat en 2007 du parti au pouvoir, le PDP, aujourd'hui profondément divisé sur la question et surtout sur la succession qui se profile à l'horizon.

Le fait que M. Jonathan soit un chrétien du sud pourrait poser problème, car il revient aux musulmans du nord d'occuper la présidence jusqu'en 2015 selon une règle non écrite mais bien établie d'alternance tous les huit ans.

Olusegun Obasanjo, un chrétien Yorouba, avait exercé le pouvoir de 1999 à 2007.