Deux groupes rivaux de pirates somaliens se sont affrontés à l'arme lourde dans la nuit de lundi à mardi dans leur repaire côtier de Harardere, se disputant la rançon de plusieurs millions de dollars versée pour un superpétrolier grec, une vendetta qui a déjà fait six morts.

Trois pirates et un civil ont été tués dans des combats qui ont éclaté lundi soir et se sont poursuivis dans la nuit, ont rapporté des chefs coutumiers et des pirates de Harardere (330 km au nord de Mogadiscio), interrogés mardi au téléphone par l'AFP.

Selon d'autres témoins à Harardere, deux pirates avaient déjà trouvé la mort dans une première fusillade dimanche, peu après le versement de la rançon.

Le climat à Harardere s'était rapidement détérioré dimanche dans la foulée du versement par les airs, sur le pont du superpétrolier grec Maran Centaurus, d'une rançon comprise entre 5,5 et 7 millions de dollars, l'une des plus importantes jamais concédées aux pirates somaliens.

«La situation est calme ce (mardi) matin mais il y a encore beaucoup de tension entre les pirates. Trois d'entre eux, y compris un de leurs chefs, ont été tués jusqu'à présent et trois autres blessés», a déclaré à l'AFP un notable local, Moalim Abdalla Hasan.

«Nous tentons de faire une médiation entre eux car ils perturbent notre paix. Un civil a été tué dans une fusillade et les habitants sont très inquiets de cette vendetta», a-t-il ajouté.

Hassan Nile, un commerçant de la bourgade a expliqué qu'il n'avait pu ouvrir son échoppe mardi en raison de l'insécurité, précisant que les pirates avaient eu recours dans la nuit à des armes lourdes et des «technicals», véhicules 4X4 surmontés de mitrailleuses lourdes ou de batteries anti-aériennes.

«Tout lien est complètement rompu entre les deux groupes. Trois pirates sont morts depuis hier (...), d'autres gens risquent de mourir, dont des civils», a-t-il mis en garde.

Un autre résident, Hussein Warsame, expliquait lundi soir à l'AFP comment les combats avaient paralysé la localité: «Il n'y a aucune allée et venue pour  le moment. Les pirates s'affrontent à l'arme de guerre dans le village et il y a des cadavres dans les rues où ils se battent».

Les querelles entre pirates somaliens autour des rançons et de leur partage ne sont pas rares mais les affrontements de la nuit de lundi à mardi comptent parmi les plus violents enregistrés à ce jour.

Selon Ecoterra International, une ONG environnementaliste qui suit de près la piraterie somalienne, les pirates du Maran Centaurus auraient en fait reçu 9 millions de dollars, via deux paiements séparés au moins.

Quelque 7 millions de dollars auraient été jetés par les airs sur le pont du cargo dimanche et deux autres millions auraient été payés par le biais de systèmes de transferts d'argent.

Si les pirates sont réputés pour redistribuer une partie de leur butin à leur amis et d'en faire profiter l'économie locale, ils sont accusés par certains habitants d'avoir contribué à gonfler les prix et d'avoir introduit alcool et prostitution dans la région.

Le Maran Centaurus et ses 28 marins ont quitté Harardere lundi et faisaient route vers Durban en Afrique du sud, sous escorte d'un navire de guerre européen.