Le président soudanais Omar el-Béchir, sous le coup d'un mandat d'arrêt international, a renoncé à assister lundi en Turquie à une réunion de l'Organisation de la conférence islamique (OCI), a indiqué dimanche l'agence officielle Suna, évoquant des impératifs domestiques.

M. Béchir, qui assistait dimanche au Sommet Chine-Afrique à Charm el-Cheikh, en Egypte, a téléphoné dans la soirée au président turc Abdullah Gül pour lui signifier qu'il ne pouvait se rendre à la réunion d'Istanbul, a indiqué Suna.

Selon la même source, le président soudanais a affirmé devoir rentrer à Khartoum afin de «trouver une solution» au différend qui oppose son parti à l'ex-rébellion sudiste.

L'agence turque Anatolie, citant des sources «crédibles», avait peu avant affirmé qu'Omar el-Béchir, visé par un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité au Darfour (ouest du Soudan), ne se rendrait pas à Istanbul.

La presse turque parue dimanche avait également indiqué que ce déplacement, qui met Ankara dans une position délicate, risquait d'être annulé en raison des réactions internationales, dont celle de l'Union européenne.

«Les Soudanais voient et comprennent bien les difficultés», avait déclaré à l'AFP un haut diplomate turc ayant requis l'anonymat avant l'officialisation de l'annulation.

La Turquie, musulmane mais laïque, n'a pas ratifié le Statut de Rome de 2002 qui instaurait la CPI mais l'UE, à laquelle elle souhaite adhérer, l'incite à le faire pour se conformer à ses normes.

Dimanche, le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, qui dirige un parti issu de la mouvance islamiste, a douté que le président du Soudan ait pu orchestrer un génocide au Darfour, affirmant qu'«aucun musulman ne peut perpétrer un génocide».

Mais d'après Suna, l'annulation du voyage d'Omar el-Béchir est liée à l'actualité soudanaise et la question du Sud-Soudan.

Le nord et le sud du Soudan ont mis fin en 2005 à plus de deux décennies de guerre à l'origine de deux millions de morts. Un accord de paix, qui a permis la formation d'un gouvernement d'union nationale, prévoit des élections en avril 2010 et un référendum début 2011 sur l'éventuelle sécession du Sud.

Mais le Parti du congrès national (NCP) de M. Béchir et les ex-rebelles sudistes du Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM) s'opposent sur des projets de lois clés devant être adoptés afin de garantir la bonne tenue de ces scrutins.

Les deux partis ont tenu dimanche des pourparlers au palais présidentiel à Khartoum afin de régler leurs différends, selon des sources politiques dans la capitale.

«En raison de la nécessité de consulter le président de la République au cours des prochains jours sur ces enjeux, le président a reporté son voyage en Turquie», souligne ainsi l'agence Suna.

Lundi, le sommet d'Istanbul doit en revanche accueillir une autre personnalité controversée, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad.

M. Ahmadinejad est arrivé dimanche après-midi dans la métropole turque et s'est entretenu avec M. Erdogan, qui s'est tout récemment rendu à Téhéran pour signer des partenariats commerciaux et énergétiques.

La réunion accueillera également le Premier ministre palestinien Salam Fayyad, ainsi que les présidents syrien Bachar al-Assad et afghan Hamid Karzaï.

Le sommet de l'OCI, qui réunit 57 Etats pour une journée, est axé sur les questions commerciales et la lutte contre la pauvreté.