Leader présumé d'Al-Qaeda en Afrique de l'est, le Comorien Fazul Abdullah Muhammad échappe depuis une dizaine d'années à la traque des Américains et combat aujourd'hui en Somalie au côté des insurgés islamistes shebab.

Benjamin d'une fratrie de six enfants, Fazul Abdullah est né le 25 août 1972 à Moroni, selon un rapport du «Combating Terrorism Center» (CTC) de l'académie militaire de West Point. Fazul a vécu une enfance parfaitement normale, se souviennent ses proches: il jouait au football, aimait montrer ses prouesses au kung-fu et danser le «moon-walk» de Michael Jackson.

Comme tous les gamins comoriens, il étudie le Coran dès quatre ans. Fazul entame sa radicalisation à 16 ans en devenant l'élève de Soidiki M'Bapandza, un sheikh salafiste en marge de l'islam modéré pratiqué dans l'archipel.

En 1990 le jeune homme part pour le Pakistan, où il abandonne très rapidement un cursus de médecine pour s'engager comme futur «moujahidine» en Afghanistan, explique le CTC.

Il suit alors un entrainement et endoctrinement intensifs dans l'école du jihad de «Beïd al-Ansar» à Peshawar, célèbre «guest-house» fondée par Oussama ben Laden et le précheur Abdullah Azzam, qui servira par la suite de pépinière à Al-Qaeda.

En 1991, Fazul écrit dans une lettre à sa famille avoir «rejoint» Al-Qaeda.

En 1993, il participe à sa première «mission» en Somalie où il part avec un petit groupe de jihadistes entraîner les islamistes qui combattent les casques bleus de l'ONU.

Il revient brièvement au Comores en 1994, puis s'installe au Kenya. Il vit alors entre Khartoum, Nairobi et Mogadiscio, consacrant l'essentiel de son temps à la préparation des attentats anti-américains de Nairobi et Dar es-Salaam, qui feront 218 morts en juillet 1998.

Il est un «acteur-clé» du complot et conduit lui-même le pick-up qui guide le camion bourré d'explosifs devant la représentation américaine à Nairobi. Fazul occupe alors «une position intermédiaire au sein d'Al-Qaeda», selon le CTC.

De 1999 à 2001, Al-Qaeda investit des millions de dollars dans le business des «diamants du sang» au Liberia. Fazul sera l'un des deux maîtres-d'oeuvre de l'opération, devenant l'invité presque permanent du président Charles Taylor.

En 2002, le Comorien se voit confier la direction des opérations d'Al-Qaeda pour toute l'Afrique de l'est.

Depuis l'archipel paradisiaque de Lamu (nord du Kenya), il planifie les attentats anti-israéliens de Mombasa, qui ont fait 15 morts le 28 novembre 2002.

Fazul jouerait aujourd'hui un rôle influent au sein des shebab, où il organiserait notamment «l'entrainement et la préparation des opérations suicide», assure le chercheur norvégien Stig Jarle Hansen.

Le 8 janvier 2007, il survit à un bombardement américain qui fait des dizaines de morts à Ras Kamboni (sud Somalie). Deux jours plus tard, l'armée kényane le manque de peu à la frontière, dans la forêt de Kiunga.

Le 2 août 2008, il échappe de justesse à un raid de la police à Malindi (nord du Kenya).

«Expert en informatique», le fugitif «aime à porter une casquette de baseball et à s'habille de manière plutôt décontractée», selon les autorités US, qui offrent 5 millions de dollars pour sa capture.

L'homme sera «difficile» à neutraliser, avertit West Point: il utilise une douzaine de pseudonymes, parle parfaitement cinq langues, et «a des contacts étendus avec tous les milieux criminels de la région».

Passé maître dans l'art du déguisement, «remarquablement intelligent et parfaitement entraîné, il est l'un des plus dangereux terroristes internationaux en vie aujourd'hui», selon le CTC.