La situation restait tendue vendredi au Gabon, où deux personnes ont été tuées dans les violences qui ont suivi la victoire d'Ali Bongo à la présidentielle, contestée par l'opposition qui a appelé à «la résistance».

Les deux morts se sont produites à Port-Gentil, capitale économique et deuxième ville du pays, où les troubles persistaient vendredi soir alors que le calme était revenu à Libreville.

«Mon frère, Mbadinga Boulingui, 33 ans, a reçu une balle dans la tête hier (jeudi) vers 11h00 au quartier de La Balise alors qu'il tentait de rentrer chez lui. Il est décédé aujourd'hui vers 13h00», a confié vendredi à l'AFP un habitant, joint au téléphone depuis Libreville.

«Juste au moment où j'amenais le corps de mon frère à la morgue, celui d'un autre homme, tué aujourd'hui (vendredi), a été amené», a-t-il ajouté.

Un élu national originaire de Port-Gentil a confirmé à l'AFP la mort de ces deux personnes.

Vendredi le commissariat du Château a été saccagé et brûlé par des manifestants, a constaté un journaliste de l'AFP. Les policiers ont fui et les pillards ont libéré les personnes qui s'y trouvaient en garde à vue, selon des témoignages concordants.

En fin de journée, quelque 250 personnes réparties en petits groupes mobiles ont pillé des commerces dans le quartier de Ngadi, au nord de la ville, selon le journaliste de l'AFP, qui a vu arriver vers 13h30 deux véhicules des forces de l'ordre.

Le Foyer Roger Buttin, un centre sportif et social du groupe pétrolier français Total, au sud, était en feu, ont indiqué à l'AFP trois témoins qui ont préféré garder l'anonymat.

Le gouvernement a opéré un «renforcement des mesures de sécurité sur toute l'étendue du territoire gabonais», en attribuant «toutes compétences pour prendre les mesures» requises à des postes de commandement de crise «créés à cet effet», selon un communiqué diffusé jeudi.

Le gouvernement a aussi exhorté les forces de l'ordre à s'abstenir «de violences» dans leur mission et à «réagir avec fermeté et promptitude pour mettre fin au désordre et garantir la sécurité de tous».

Dans un entretien publié par Le Monde, Ali Bongo, dont la Cour Constitutionnelle a confirmé vendredi l'élection, a appelé l'opposition à accepter «le verdict des urnes» et pointé ses «responsabilités» dans les troubles.

«La compétition est maintenant terminée. Le peuple gabonais ne peut pas être pris en otage», a ajouté le fils du président défunt Omar Bongo, élu, selon les chiffres officiels, avec 41,73% des suffrages pour un mandat de sept ans.

L'Union du peuple gabonais (UPG) de l'opposant Pierre Mamboundou, officiellement arrivé troisième (25,22%) à la présidentielle derrière l'ex-ministre de l'Intérieur André Mba Obame (25,88%), a appelé à «la résistance».

«Face à l'oppression, l'UPG se prévaut de la déclaration universelle des droits de l'Homme qui, en pareille circonstance, légitime le recours à la résistance», a déclaré son porte-parole.

L'UPG a fait part de sa «grande préoccupation pour la vie de (son) leader», assurant n'avoir aucune nouvelle de lui depuis la dispersion, jeudi, d'un sit-in devant la commission électorale à Libreville.

Son entourage avait pourtant affirmé jeudi l'AFP à que M. Mamboundou était «en lieu sûr» mais qu'il avait été «blessé à la tête et à l'épaule».

Dans un communiqué officiel, le gouvernement a indiqué vendredi soir qu'il «ne saurait tolérer la volonté de chaos qui anime certains candidats et leurs militants» qui voudraient «plonger le pays dans les abîmes d'une violence politique».

Le ministre de l'Intérieur, également chargé de la Défense, Jean-François Ndongou, a déclaré par ailleurs que le Gabon n'avait «pas besoin» de «l'aide militaire de la France», qui y dispose d'un millier d'hommes.

Paris a de nouveau demandé à ses ressortissants d'éviter les déplacements et condamné les violences. «C'est aux autorités gabonaises d'apporter la sécurité dans le pays», a déclaré le porte-parole du quai d'Orsay Eric Chevallier, ajoutant que les militaires français restaient «mobilisés».