La Guinée-Bissau organise dimanche une élection présidentielle alors que ce pays pauvre d'Afrique de l'Ouest, devenu une plaque tournante dans le trafic de cocaïne d'Amérique latine vers l'Europe, est plongé dans une spirale infernale d'assassinats politiques.

Ce scrutin, initialement prévu en 2010, intervient après la mort du président Joao Bernardo Vieira, assassiné par des militaires dans la nuit du 1er au 2 mars quelques heures après la mort du chef d'état-major de l'armée, le général Batista Tagmé Na Waïe, dans un attentat à la bombe.

Le 5 juin, le ministre de l'Administration territoriale et candidat à la présidence Baciro Dabo ainsi que l'ex-ministre de la Défense Helder Proença, tous deux proches de l'ex-président Vieira, étaient assassinés à leur tour après des accusations de participation à une tentative présumée de coup d'Etat.

Ce climat d'insécurité extrême a poussé Me Pedro Infanda, qui se présentait sans étiquette, à se retirer de la course, ce qui réduit à onze, dont trois anciens chefs d'Etat, le nombre de candidats pour le scrutin de dimanche.

Parmi ces trois ex-chefs d'Etat, un favori se détache, Malam Bacaï Sanha, président intérimaire de juin 1999 à mai 2000 et candidat du Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC, ex-parti unique). Le PAIGC contrôle déjà 67 des 100 sièges à l'Assemblée nationale.

Il devra notamment faire face aux ex-président Kumba Yala (2000-03) et Henrique Rosa (2003-05)

Un éventuel second tour est prévu un mois après le premier tour, soit le 28 juillet.

Mais pour la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'homme (Raddho), une ONG basée à Dakar, la «situation de peur et de terreur actuelle n'est nullement propice pour organiser des élections crédibles le 28 juin».

Elle a en conséquence appelé la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao, 15 pays) à déployer une «force de dissuasion» militaire pour prévenir» d'éventuelles violences.

De son côté, la Cédéao a tenté de faciliter le bon déroulement de l'élection en annonçant cette semaine avoir versé trois mois d'arriérés de solde aux forces armées de Guinée-Bissau. Elle a aussi appelé à une conférence des bailleurs de fonds après le scrutin.

Mais le problème demeure pour les autres fonctionnaires restés trois mois sans salaire, dans ce pays classé 175e sur 177 dans le rapport 2007/08 du développement humain de l'ONU et dont le principal produit d'exportation est la noix de cajou.

La Raddho et l'Union européenne (UE) notamment ont annoncé l'envoi d'observateurs dans cette ancienne colonie portugaise d'environ 1,5 million d'habitants, indépendante depuis 1974 mais très fragilisée par le narcotrafic.

Selon l'ONU, la Guinée-Bissau est devenue ces dernières années un important point de transit dans le trafic de cocaïne d'Amérique latine vers l'Europe. De hauts responsables de l'Etat et de l'armée sont, selon plusieurs sources, soupçonnés d'être impliqués dans ce très juteux trafic.