Le Tchad, accusé vendredi par Khartoum d'avoir mené deux raids aériens dans l'ouest de son territoire, où se trouvent des rebelles tchadiens, a implicitement reconnu l'attaque en jugeant que le Soudan était «le voleur qui crie au voleur».

«C'est décidément le voleur qui crie au voleur», a affirmé le porte-parole du gouvernement tchadien, Mahamat Hissène, dans une déclaration diffusée aux médias vendredi soir aux réactions soudanaises.

«Deux avions tchadiens ont mené des raids dans des zones situées à 60 kilomètres à l'intérieur du Soudan (...) avait auparavant indiqué le porte-parole du ministère soudanais des Affaires étrangères, Ali Sadiq, dans un communiqué.

«L'armée soudanaise est prête à répondre mais attend les instructions», avait-il ajouté, précisant que ces raids ont eu lieu à 10h30 et 13h30 heure locale dans des zones désertiques et n'ont fait ni victimes ni dégâts.

Le Tchad, qui pourchassait les rebelles tchadiens, a répondu qu'il ne faisait que répondre aux action soudanaises: «Si débordement il y a dans les affrontements (...) ce n'est que la conséquence de l'attaque organisée par les Soudanais contre le Tchad en utilisant ses mercenaires armés, entraînés, financés et dirigés par satellite par le régime de Khartoum», a poursuivi M. Hissène, également ministre de la communication.

Les rebelles tchadiens ont lancé la semaine dernière une offensive contre N'Djamena mais ont été contraints par l'armée tchadienne de regagner l'ouest du Soudan, où ils sont basés.

«La poursuite exercée par l'armée tchadienne ne vise qu'à mettre hors d'état de nuire les hordes instrumentalisées par le pouvoir de Khartoum, qui les recrute, les arme et les lance sans cesse contre le Tchad», a poursuivi M. Hissène, sans nier les attaques.

N'Djamena avait récemment évoqué le «droit de poursuite» contre les rebelles tchadiens sans préciser s'il allait l'exercer. Il l'avait fait en 2007 lors d'une précédente attaque rebelle.

«Puisque le régime de Khartoum n'est pas prêt à renoncer à ces offensives dévastatrices, le Tchad est en droit de détruire le mal y compris par des actions préventives contre les lieux de formation et de regroupement des mercenaires», a encore ajouté M. Hissène.

«Ce ne sont pas les menaces de riposte du régime soudanais qui feront plier les forces tchadiennes», a-t-il conclu.

Khartoum et N'Djamena s'accusent mutuellement, de longue date, de complaisance à l'égard de leurs mouvements rebelles respectifs.

Les deux pays ont toutefois signé le 3 mai un accord de réconciliation à Doha, au Qatar, qui prévoit notamment le contrôle des frontières pour empêcher les infiltrations de rebelles tchadiens venant du Soudan et de rebelles soudanais venant du Tchad.

En lançant leur dernière offensive en date contre le régime de N'Djamena, les rebelles tchadiens avaient assuré ne pas prévoir de revenir sur le sol soudanais en cas d'échec.

Mais, selon des sources occidentales, les rebelles ont été forcés de quitter le Tchad, pourchassés par une armée nationale tchadienne bien organisée et soutenue par d'importants moyens aériens, des avions de chasse Sukhoï et des hélicoptères.

Auparavant, à la suite des combats des 6,7 et 8 mai, les rebelles n'avaient pas, comme lors de précédentes attaques, retraversé la frontière vers leur sanctuaire soudanais. Ils avaient tenté de se regrouper et de se réorganiser dans le sud-est du Tchad, une zone qu'ils connaissent bien et qui pouvait leur être favorable avec des collines et quelques zones boisées.

Jusqu'à mercredi, certains observateurs ont fait état de groupes rebelles dispersés le long de la frontière, alors que les insurgés multipliaient les déclarations assurant être au Tchad.

Pour des source diplomatiques occidentales et une source militaire française à N'Djamena, la raison était simple: le président soudanais Omar el-Béchir avait «demandé aux rebelles de ne plus revenir».

La paix entre le Tchad et le Soudan est jugée essentielle dans l'optique de mettre un terme au conflit qui sévit depuis six ans au Darfour, région soudanaise frontalière du Tchad.