Le président soudanais Omar el-Béchir, sous le coup d'un mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale, a de nouveau défié la CPI mercredi en se rendant en Égypte, où il s'est entretenu avec son homologue Hosni Moubarak.

La visite de M. Béchir au Caire est la deuxième à l'étranger depuis l'émission du mandat d'arrêt de la CPI le 4 mars, pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité au Darfour, région de l'ouest du Soudan en guerre civile depuis 2003.

M. Béchir a été accueilli à l'aéroport par M. Moubarak lui-même, selon l'agence officielle égyptienne Mena.

Les deux chefs d'État ont ensuite eu un entretien bilatéral de quelques heures. M. Béchir s'est envolé pour Khartoum vers 9 h HAE.

Le chef de la diplomatie soudanaise, Deng Alor, a souligné lors d'une conférence de presse commune avec son homologue égyptien Ahmed Aboul Gheit que cette visite intervenait après une invitation du gouvernement égyptien.

MM. Moubarak et Béchir se sont entretenus «de la situation au Darfour, des moyens de parvenir à une solution à ce conflit interne et de garantir une situation humanitaire qui ne permette à aucune partie étrangère de prétendre qu'il y a une crise humanitaire au Darfour», a déclaré M. Aboul Gheit.

«Il y a une position égyptienne, arabe et africaine qui n'accepte pas la manière dont la cour traite le président soudanais», a-t-il ajouté.

Comme la plupart des pays arabes, à l'exception de la Jordanie et des Comores, l'Égypte n'est pas signataire du traité de Rome instituant la Cour.

Le Caire avait demandé à la CPI de surseoir à l'inculpation du président soudanais. Les autorités égyptiennes avaient estimé que ce mandat risquait d'avoir «des conséquences dangereuses sur la situation au Darfour et au Soudan en général».

La guerre civile au Darfour a fait 300 000 morts depuis 2003, selon l'ONU -10 000 selon Khartoum-- et 2,7 millions de déplacés.

Les 22 membres de la Ligue arabe comme les 53 États de l'Union africaine (UA), se sont prononcés contre le mandat de la CPI et ont entamé des procédures auprès du Conseil de sécurité de l'ONU pour qu'il suspende la procédure à l'encontre de M. Béchir.

Lundi, le président soudanais s'était rendu en Erythrée pour son premier voyage officiel à l'étranger depuis le mandat d'arrêt.

Il est aussi question qu'il se rende au sommet arabe à la fin du mois au Qatar, pays non signataire du traité de Rome.

Mais le comité des oulémas soudanais a récemment émis une fatwa lui déconseillant de se rendre à ce sommet, car il pourrait tomber dans un piège tendu par «des ennemis de Dieu et de la souveraineté nationale».

Mardi, les États-Unis ont indiqué qu'ils n'étaient pas soumis à «l'obligation juridique» de procéder à l'arrestation de M. Béchir, n'étant pas signataires du traité de Rome.

Aussitôt après la décision de la Cour, Khartoum avait ordonné l'expulsion de 13 des plus importantes ONG internationales actives au Darfour, en les accusant de collaboration avec la CPI et d'espionnage.

L'ONU estime déjà que plus d'un million de personnes sont pénalisées par ces expulsions. Khartoum conteste ce chiffre et assure être en mesure de «combler le vide».

Dans la nuit de mardi à mercredi, des inconnus ont mis le feu à un camp de déplacés du Darfour-ouest, détruisant des centaines d'abris et causant au moins un décès, selon des sources locales et au sein de l'ONU.