Des peines d'un an à six ans de prison ferme ont été requises mercredi à Paris à l'encontre des principaux prévenus, dont le fils de l'ancien président français François Mitterrand, au procès de l'Angolagate, vaste affaire de trafic d'armes vers l'Angola dans les années 90.

Le procureur Romain Victor a aussi requis trois ans de prison avec sursis contre l'ancien ministre français de l'Intérieur Charles Pasqua, dans ce procès où sont jugées 42 personnalités politiques et des affaires depuis le 6 octobre.

Six ans de prison ferme ont été requis contre les hommes d'affaires français et israélien Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak, dix-huit mois ferme contre l'ancien agent secret et ancien préfet français Jean-Charles Marchiani et un an de prison contre Jean-Christophe Mitterrand, fils de l'ancien président socialiste.

Dans son réquisitoire, le procureur a accusé l'Etat français d'avoir pratiqué le «laisser-faire», soulignant que les raisons de cette attitude «sont à chercher dans les intérêts économiques et stratégiques qui apparaissent en filigrane» dans ce dossier.

Depuis le 6 octobre, le tribunal correctionnel de Paris tente de démêler les responsabilités dans ce commerce d'armes.

L'arsenal d'armes de guerre d'une valeur de près de 800 millions de dollars a été vendu de 1993 à 1998 à l'Angola, alors en proie à la guerre civile.

Pendant que ce commerce se développe, «rien ne se passe, aucune dénonciation n'intervient (...) puisque le ministère de la Défense ne portera plainte qu'en 2001, après avoir été saisi par le juge d'instruction», a souligné le procureur.

Il a rappelé que des articles de presse ou une note des services de renseignement alertaient pourtant sur ce «trafic illicite».

«Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak avaient des relations directes avec les services de renseignement français (et) disposaient de relais puissants dans l'appareil d'Etat», a-t-il affirmé.

Il a aussi dénoncé «l'ambiance de plomb» et les «menaces à peine voilées» proférées durant ce procès, dont l'Angola a demandé officiellement l'annulation.

Plusieurs hauts responsables angolais, dont le président José Eduardo dos Santos, sont cités par l'accusation comme bénéficiaires d'énormes pots de vin, même si aucun d'entre eux n'est poursuivi.

L'affaire empoisonne depuis des années les relations entre Luanda et Paris, qui a tenté de «tourner la page des malentendus» avec une visite en mai du président français Nicolas Sarkozy en Angola.

Pierre Falcone et Arcadi Gaydamak, qui ne s'est pas présenté au procès, sont accusés d'avoir organisé de 1993 à 1998 un vaste trafic d'armes vers l'Angola, sans les autorisations nécessaires de l'Etat français, versant de nombreux pots-de-vin à des personnalités angolaises et françaises.

Ils assurent qu'il n'y avait là rien d'illégal puisque ces ventes étaient effectuées par leur société slovaque ZTS Osos, et n'avaient donc pas besoin d'autorisation de la France.

Plusieurs des prévenus ont assuré à maintes reprises durant les quatre mois d'audiences que «tout le monde» était au courant de ce commerce, mais que Paris avait préféré se taire, d'abord parce qu'il soutenait le régime de dos Santos, contre la rébellion de l'Unita, puis parce que l'Angola pacifié était devenu un important exportateur de pétrole.