Deux diplomates canadiens enlevés il y a sept semaines au Niger sont apparus vivants sur un enregistrement vidéo adressé au Canada par leurs ravisseurs, ont affirmé des sources maliennes proches de l'enquête, ce que le gouvernement canadien s'est refusé à confirmer ou infirmer.

«Dans la cassette, on voit tour à tour les deux diplomates canadiens intervenir devant la caméra, pour se présenter», a déclaré samedi soir à l'AFP un notable du nord du Mali qui a dit avoir visionné l'enregistrement. Cette «preuve de vie» a également été présentée à une autre source locale,  résidant à Bamako et s'exprimant sous le couvert de l'anonymat.

L'enregistrement vidéo de quelques minutes de donne pas d'indication sur la date de tournage.

Les disparitions de Robert Fowler, envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU pour le Niger, de son collègue Louis Gay et de leur chauffeur nigérien, Soumana Moukaila, avaient été signalés à la mi-décembre, à l'ouest de Niamey; ils avaient auparavant effectué une visite privée, dans une mine d'or exploitée par une société canadienne à Samira, le 14 décembre.

Devant la caméra, «c'est M. Fowler qui s'est présenté le premier. Derrière lui, il y avait des hommes armés. M. Fowler a demandé dans ses propos de répondre aux sollicitations de ses ravisseurs, mais sans donner plus de détails», a expliqué la source malienne résidant à Bamako.

M. Gay avait «l'air abattu». En revanche, le chauffeur nigérien n'apparaît pas sur cette vidéo expédiée aux Canadiens dans des conditions qui n'ont pas été révélées.

Selon les deux sources maliennes, le fait que des hommes armés et enturbannés se tiennent derrière les deux diplomates onusiens au moment où ils s'expriment peut laisser penser que les ravisseurs appartiennent plutôt au milieu islamiste, proche de l'organisation terroriste Al-Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI).

Les groupes touareg nigériens, combattus par l'armée dans le nord du Niger, n'ont en effet pas l'habitude d'apparaître à l'image quand ils revendiquent des actions, font valoir ces sources.

À Niamey, dimanche, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement nigérien, Mohamed Ben Omar, a affirmé à l'AFP: «On n'a rien reçu comme cassette vidéo sur les deux diplomates canadiens. On attend de voir la suite. Mais nous sommes à présent sûrs qu'ils ne sont plus en territoire nigérien».

Quant aux autorités canadiennes, elles maintiennent la plus grande discrétion sur cette affaire.

«Nous ne partagerons pas d'information qui pourrait compromettre nos efforts ou qui pourrait mettre en danger les individus impliqués», a insisté samedi soir Marie-Christine Lilkoff, une porte-parole du ministère des Affaires étrangères dans un message électronique.

Mme Lilkoff avait utilisé exactement les mêmes termes lorsque, fin janvier, le quotidien canadien Ottawa Citizen avait cité une source anonyme au Conseil de sécurité de l'ONU affirmant: «Il y a eu des indications il y a quelques jours qu'il (Robert Fowler, ndlr) était vivant».

L'hypothèse couramment citée par des sources maliennes est celle d'un enlèvement des diplomates par des «sous-traitants» qui les auraient «revendus» à un groupe islamiste.

Les ravisseurs n'ont pas fait part de leurs exigences directement dans la vidéo mais pourraient l'avoir fait par un autre canal, soulignent les sources maliennes.

Des élus du nord du Mali avaient également attribué au réseau Al-Qaeda l'enlèvement fin janvier de quatre touristes européens dans la zone frontalière entre le Mali et le Niger, bien que cette action n'ait pas été revendiquée.