Le Ghana se préparait mercredi dans un calme étonnant à un «troisième tour» vendredi dans une circonscription lointaine du Ghana qui décidera du nom du prochain président pour quatre ans.

A Accra, mercredi matin, c'était «business as usual»: la capitale s'est réveillée comme un jour ordinaire malgré la décision surprise la veille de la commission électorale de ne pas annoncer comme prévu le vainqueur de l'élection présidentielle de dimanche dernier.Magasins et banques, qui avaient fermé mardi plus tôt que d'habitude par peur de débordements de militants frustrés, ont ouvert normalement leurs portes.

Les petites épiceries-cantines ont aussi fait leur réapparition dans les rues. Ici ça sent la banane plantain frite à l'huile, plus loin on fait bouillir des oeufs qu'on vend à la criée.

Les marchands de recharges pour téléphones portables ont réinvesti les trottoirs et se faufilent comme d'habitude entre les voitures, tandis que les bus et les taxis ont repris du service.

Et pourtant mardi certains redoutaient encore le pire, quasi un scenario «à la kényane» après la décision de la commission de reporter son verdict final de plusieurs jours.

Alors que l'opposant John Atta-Mills semblait sûr de sa victoire dans une atmosphère politique de plus en plus tendue, la commission a bien confirmé qu'il était en tête des résultats portant sur 229 circonscriptions sur 230, mais qu'il fallait attendre le résultat de la toute dernière, celle de Tain (centre-ouest), qui votera vendredi. Au premier tour, le 7 décembre elle était tombée dans l'escarcelle d'Atta-Mills.

Dimanche, M. Atta-Mills, du Congrès national démocratique (NDC), a obtenu 4.501.466 voix (50,13%), contre 4 478 411 suffrages (49,87%) à M. Akufo-Addo, du Nouveau parti patriotique (NPP, au pouvoir), alors que 12,5 millions d'électeurs étaient appelés à choisir un successeur à John Kufuor après huit de pouvoir.

Selon la commission le résultat de la 230e circonscription pourrait tout faire basculer: l'écart entre les deux hommes n'est actuellement que de 23 055 voix, autant dire rien sur 8 979 877 de suffrages exprimés, alors que 53 000 électeurs doivent voter vendredi.

Reflet du flegme ambiant, la presse de tous bords ne faisait pas mercredi dans le sensationnel, visiblement pour ne pas exacerber les passions.

«Pas encore de vainqueur: Tain va décider», titre sobrement le Daily Graphic, le plus grand quotidien du pays. Même ton apaisant au Ghanaian Times: «second tour dans l'impasse: Tain décide».

Seul le Daily Guide fait état dans son gros titre de l'avance de John Atta-Mills.

Dans les deux camps, on affichait mercredi la même sérénité et la même certitude dans la victoire.

Du côté de l'opposition, certains n'hésitaient pas à comparer la «bataille de Tain» qui se profile au scrutin épique de Floride lors de la présidentielle américaine de 2000.

Cet Etat américain avait donné la victoire à George W. Bush face à Al Gore au terme d'un rocambolesque feuilleton juridico-politique d'un mois fait de comptes et recomptes. Bush avait finalement emporté les 25 grands électeurs de l'Etat pour 537 petites voix d'avance.

«Nous allons à Tain pour terminer le combat, pour sceller notre victoire. Tain sera notre Floride à nous ! On va en finir avec eux et prouver qu'on est les meilleurs», proclame avec assurance Dan, un militant du NDC.