Les pirates somaliens, insensibles au déploiement d'une force navale de l'Union européenne au large de leurs côtes, ont mené une nouvelle série d'attaques dans le golfe d'Aden tandis que l'ONU renforçait considérablement le dispositif de lutte contre la piraterie.

Trois bateaux - le cargo turc Bosphorus Prodigy, un remorqueur et un plaisancier - ont été capturés mardi par des pirates somaliens dans le golfe d'Aden, a annoncé mercredi Andrew Mwangura, responsable de la branche est-africaine d'un programme d'assistance aux marins basé au Kenya.

Par ailleurs, une intervention des forces internationales présentes dans la zone a permis de déjouer une attaque contre un bateau chinois, le Zhenhua 4, et ses 30 membres d'équipage. La Chine envisage à son tour d'envoyer des navires de guerre dans la zone.

Le Centre antipiraterie du Bureau maritime international (BMI), installé à Kuala Lumpur, a confirmé mercredi l'attaque de deux bateaux de commerce, un cargo turc et un remorqueur malaisien, vraisemblablement les mêmes que ceux évoqués par M. Mwangura.

«Ils ont été pris dans le golfe d'Aden», a déclaré à l'AFP M. Mwangura, ajoutant n'avoir pas d'information précise dans l'immédiat sur les nationalités des équipages pris en otages par les pirates.

Deux personnes se trouvent à bord du bateau de plaisance et, selon M. Mwangura, les deux navires de commerce sont un cargo et un bateau d'assistance à l'exploitation pétrolière.

Un porte-parole du géant pétrolier français Total a précisé à Paris que ce navire appartenait à un «prestataire de services» du groupe.

Selon le BMI, le remorqueur malaisien arraisonné compte 11 membres d'équipage et se rendait en Malaisie.

Le cargo turc, qui reliait le Moyen Orient à l'Europe, a pour sa part essuyé des tirs à l'arme automatique depuis deux embarcations.

Au moins 108 bateaux ont été attaqués par les pirates somaliens depuis le début de l'année et 42 capturés, selon le BMI. Quatorze navires marchands et 240 membres d'équipage sont actuellement aux mains des pirates qui négocient leur libération contre des rançons.

Cette nouvelle démonstration de force intervient une semaine après le début du déploiement de la première opération navale de l'Union européenne, Atalante, destinée à protéger les bateaux du Programme alimentaire mondial de l'ONU qui délivrent une aide vitale à 3,2 millions de Somaliens, et plus généralement à lutter contre la piraterie dans le golfe d'Aden et l'océan Indien.

«En dépit de l'armada de l'UE qui patrouille le golfe d'Aden, les pirates parviennent à attaquer et capturer des bateaux car le nombre de bâtiments de guerre est insuffisant pour sécuriser des eaux si vastes», a souligné le directeur du centre antipiraterie du BMI, Noel Choong.

Atalante, dont le navire amiral grec est arrivé à Djibouti mardi, doit regrouper à terme six navires de guerre et trois avions de patrouille.

Mardi, le Conseil de sécurité de l'ONU a considérablement renforcé la possibilité pour des puissances étrangères de poursuivre les pirates en territoire somalien.

Cette nouvelle résolution autorise pour un an des opérations internationales sur le territoire de Somalie mais ne comporte pas explicitement la possibilité d'utiliser son espace aérien.

La secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice a, à cette occasion, insisté sur l'importance d'une stabilisation politique en Somalie, en guerre civile depuis 1991 et où un gouvernement provisoire ne contrôle qu'une faible partie du territoire.

Grandement affaibli par une insurrection islamiste radicale qui gagne du terrain, ce gouvernement est également au coeur d'une crise institutionnelle ouverte, le président Abdullahi Yusuf Ahmed ayant tenté de limoger son Premier ministre Nur Hassan Hussein.

Désavoué par le Parlement, il a choisi l'épreuve de force en nommant mardi un de ses proches à la tête du cabinet, paralysant un peu plus les institutions somaliennes.